MEFRA – 119/1 – 2007, p. 225-339.
Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2006
Sites des activités archéologiques et des collaborations de l’École française de Rome en 2006-2007
.
238
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
MONTERENZIO, (PROV. DE BOLOGNE).
LA NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE
DE MONTERENZIO VECCHIA
Université de Bologne, École normale
supérieure (Ulm)-UMR 8546 du CNRS,
École française de Rome
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia a livré au cours des six campagnes de fouilles réalisées entre 2000 et 2005 une quarantaine de tombes
auxquelles il faut ajouter les vestiges plus ou moins bien
conservés d’une dizaine de sépultures supplémentaires,
sauvées dans les labours en 1988, et quelques objets sans
contexte précis découverts dans les années 1880. L’ensemble, daté de la fin du IVe siècle-début IIIe siècle
av. J.-C., caractérise une phase particulièrement faste de
la civilisation celtique en Italie du nord. Installée sur le
flanc sud-occidental de la colline, la nécropole est située
à proximité d’un habitat étrusque partiellement exploré,
mais dont les limites spatiales et chronologiques restent
à définir. Situé à une trentaine de kilomètres au sud de
Bologne, le complexe archéologique de Monterenzio
Vecchia domine le versant oriental de la vallée de l’Idice
et fait face au Monte delle Formiche qui se dresse au milieu d’une large vallée définie par les cours de l’Idice et
de la Zena. Côté oriental, il domine la vallée du Sillaro
qui ouvre sur la Romagne. La proximité de la via Flaminia minor, une des principales voies de communication
antiques reliant la région padane à l’Étrurie interne,
conférait à cet établissement une importance stratégique
de premier plan. Sa position dominante et sa localisation
à mi-chemin entre la plaine du Pô au nord et les cols toscans au sud, en faisaient une place remarquable bien
que non fortifiée. Cet établissement est contemporain de
l’ensemble voisin de Monte Bibele également connu
pour son importante nécropole celto-étrusque. La proximité de ce dernier site qui domine en amont le versant
occidental de l’Idice laisse deviner l’existence d’un réseau de castella relativement dense.
Les principales caractéristiques de cet ensemble funéraire ont déjà été amplement décrites dans les précédents comptes-rendus. Rappelons que l’étude de ces
ensembles et de ceux de Felsina/Bologna, a montré l’importance de la composante étrusque dans le processus de
construction des nouvelles communautés, des Boïens en
particulier. L’archéologie funéraire de cette période offre
2. Voir D. Vitali (dir.), I bronzi degli Etruschi e dei Celti nella Valle
dell’Idice, dans Quaderni del Museo archeologico «Luigi Fantini»,
3, 2006.
.
un témoignage fort de la synthèse qui caractérise alors
ces sociétés multiethniques. Nous ne reviendrons pas ici
sur ces questions plusieurs fois abordées. Nous souhaitons davantage attirer l’attention sur certains résultats
récents des études post-fouille actuellement en cours, en
particulier l’apport de la restauration des objets métalliques. Il convient en effet d’insister ici sur l’importance
de la population guerrière (plus de 40% de l’effectif total) et par conséquent des pièces d’armement qui occupent une part prépondérante dans la composition des
mobiliers funéraires exhumés. Sur un total de 246 objets
métalliques 177 sont en fer, soit un peu plus des deux
tiers. Les pièces d’armement, au nombre de 90, représentent un peu plus de 35% de l’effectif total. Jusqu’à
présent la restauration a porté sur un peu plus de 70 objets dont une trentaine de pièces d’armement. Une exposition consacrée aux objets en bronzes a permis de
dresser un premier bilan des restaurations en 2006 (situle, passoires, kyathoi, miroirs, strigiles, fibules et
casque) 2. Au cours de ces deux dernières années une attention particulière a été accordée à la restauration des
fourreaux d’épée et des casques en vue de leur étude et
de leur présentation. Ce travail en cours donne l’occasion de revenir sur le problème de la conservation des
métaux archéologiques et plus particulièrement des objets ferreux, et de leur exploitation comme source d’information. Il sera ici plus particulièrement question de
casques et de fourreaux d’épée dans la mesure où ces
objets complexes sont caractéristiques de ce type de gisement et riches en enseignements techniques et artistiques. Deux exemples retiendront ici notre attention, le
casque de la tombe 36 et l’ensemble épée-fourreau de la
tombe 32, mais il convient tout d’abord de s’arrêter
quelques instants sur les problèmes de méthodes que
posent l’étude et la conservation des métaux archéologiques.
Malgré la nature basique du terrain, très peu corrosif
et modérément oxydant, les objets métalliques découverts à Monterenzio Vecchia sont recouverts d’une
couche de corrosion et ne peuvent pas être étudiés en
l’état. Le processus de minéralisation qui affecte ces matériaux conduit à une transformation de la morphologie
originelle et, à terme, dans le cas des alliages ferreux, à
une destruction partielle ou complète de l’objet. Une
stratégie de conservation-restauration adaptée aux problématiques d’étude a donc été mise en place afin de redonner aux objets leur lisibilité et d’assurer leur conser-
239
vation à terme. Dans cette perspective le conservateurrestaurateur n’est pas seulement pour l’archéologue un
prestataire de service, il est aussi un partenaire avec lequel sont discutés les objectifs, les choix et mis au point
des protocoles adaptés aux besoins de l’étude. Sa présence sur le terrain a souvent été requise pour consolider les objets et effectuer les prélèvements dans de
bonnes conditions. La restauration et le soin apporté à la
conservation de ces vestiges permettent de multiplier les
observations techniques, de préciser les typologies et, en
combinant ces résultats, d’affiner les chronologies.
La corrosion des objets en fer provenant de Monterenzio Vecchia est très homogène. Si la surface est entièrement transformée par la corrosion, la pénétration
de la corrosion varie en revanche d’un objet à l’autre,
certains étant encore parfois localement très métalliques. En ce qui concerne les objets en alliage cuivreux
la corrosion est beaucoup moins importante en raison de
la «noblesse» électrochimique du métal. Les objets sont
généralement recouverts d’une fine couche de produit
de corrosion du cuivre mêlé, au niveau des couches externes, avec le sédiment argilo-calcaire du milieu d’enfouissement. Les objets présentent aussi assez souvent
des altérations mécaniques (cassures anciennes ou advenues au moment du dépôt dans la tombe, cassures récentes, survenues pendant ou après la fouille, dues notamment au processus de corrosion active et aux manipulations répétées). En effet, lors de la fouille, les
changements des paramètres de conservation (l’augmentation du taux d’oxygène et la variation du taux
d’humidité) modifient l’équilibre qui s’était formé entre
le métal et son milieu d’enfouissement. La présence
dans les couches de corrosion d’ions chlorures provoque
enfin, à proximité de la surface métallique et des fissures, une nouvelle oxydation. Cette oxydation initie
une transformation des produits de corrosion instables
et engendre un processus de corrosion irréversible qui
aboutit, à plus ou moins court terme, à la destruction du
métal sous-jacent par fissuration, gonflement, délitement et enfin par un éclatement de la surface. Il faut se
rendre à l’évidence que ce processus cyclique et irréversible engendre non seulement la perte des informations
archéologiques contenues dans les couches de corrosion
mais aussi des objets eux-mêmes.
Pour éviter de telles altérations, et considérant que
les méthodes de protection généralement utilisées (application d’un film de résine acrylique ou traitement à
l’acide tannique) se sont démontrées inefficaces à long
terme, une campagne curative de stabilisation de la corrosion a été mise en place dans les locaux du musée
L. Fantini, à Monterenzio. Ce traitement de stabilisation
.
par déchloruration suit un protocole très précis. Les objets sont immergés dans des bains de sulfite alcalin, dans
le cas des objets en fer, ou de sesquicarbonate de soude,
lorsqu’il y a des éléments en alliage cuivreux. Les solutions continuellement agitées afin d’augmenter la mobilité des ions chlorures et la pénétration de la solution,
sont renouvelées à intervalles réguliers jusqu’à obtenir
une concentration des chlorures inférieure à 5 ppm, ce
qui correspond aux marges d’erreur de la méthode de
dosage. Une fois la déchloruration achevée, les objets
sont rincés jusqu’à obtenir un pH neutre et mis à sécher.
Le temps d’un traitement de déchloruration varie généralement de 4 à 6 mois. Afin d’éviter toute dégradation,
les zones sensibles des objets sont protégées temporairement durant toute la période du traitement à l’aide
d’une couche de cyclododécane (hydrocarbure stable
dont le grand intérêt est d’être hydrofuge et de se sublimer à température ambiante sans laisser de résidus en
surface). Dans le cas des fourreaux d’épée, un premier
nettoyage des couches de corrosion est effectué avant le
traitement de déchloruration, afin d’individualiser et de
protéger les zones fragiles qui pourraient se dégrader, de
reconnaître la présence de matières organiques telles
que bois, cuir, ou fibres textiles. Le nettoyage des
couches de corrosion, a pour but de retrouver l’ancienne
surface de l’objet aujourd’hui transformée par la corrosion. Cette surface qualifiée d’«originelle» est contenue
dans les couches de corrosion. Elle peut se situer à l’interface de deux couches ou dans certaines conditions
particulièrement propices à la conservation des métaux,
à l’interface métallique. C’est au niveau de la surface
originelle que sont contenues les informations qui caractérisent l’objet : forme générale, traces de fabrication,
d’utilisation ou de destruction, décors éventuels...
Les méthodes de nettoyage sont choisies en fonction
des caractéristiques physico-chimiques des couches
préalablement observées (composition, dureté relative,
adhérence, épaisseur, etc.) et selon la diversité des matériaux composant l’objet (alliage-cuivreux, fer, émail,
matériaux organiques). Dans le cas des objets en fer, les
propriétés chimiques très voisines des oxydes et hydroxydes de fer qui composent les couches de corrosion,
ainsi que leurs manques d’uniformité, empêchent tout
recours à des traitements chimiques de nettoyage. Le dégagement de la surface originelle est donc réalisé de manière exclusivement mécanique sous loupe binoculaire à
l’aide de techniques et d’outils employées parfois
conjointement : abrasion à l’aide de fraises diamantées
montées sur un micro-tour et micro-sablage de particules abrasives (fig. 7). Lors de la restauration des objets
en alliage-cuivreux, le restaurateur peut commencer,
240
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 7 – Monterenzio Vecchia. Nettoyage par micro-sablage des couches
de corrosion recouvrant la surface de l’entrée du fourreau provenant de
la tombe 26 du site de Monterenzio Vecchia (Cliché R. Bernadet).
par exemple, par un nettoyage chimique pour solubiliser
les couches de corrosion supérieures adhérentes à la surface originelle et achever la restauration mécaniquement par piquetage, à l’aide d’un scalpel ou d’un microburin à air comprimé, ou par micro-sablage de particules
abrasives, comme du bicarbonate de sodium. La restauration d’un fourreau et de son épée peut nécessiter jusqu’à 24 heures de travail, la restauration d’un casque
comme celui de la tombe 36, présenté ci-dessous, dépasse la cinquantaine d’heures.
1 – Le casque de la tombe 36 appartient à un adulte
de sexe masculin inhumé avec un riche mobilier
comprenant des effets personnels et un service de vases
lié au cérémonial du banquet. L’équipement personnel
comprend les armes (l’épée ployée et son fourreau, une
lance, trois javelots de type pilum, un bouclier en matériau organique et un casque) et un nécessaire de toilette
(forces et rasoir, strigile et récipient en peau avec embouchure en tôle de bronze). Il n’y a là aucune trace de
parure ni même d’accessoires vestimentaires comme les
fibules. Le vaisselier comprend des récipients en céramique et en bronze, dont un mortier et une kylix, deux
formes caractéristiques des équipements masculins. Parmi les vases de cette tombe exceptionnelle figurent un
cratère stamnoïde en pâte claire de Volterra et une kylix
à figure rouge également de production étrusque. Le
mobilier était complété par divers ustensiles liés au banquet (un candélabre entièrement en fer, une paire de
chenets, des broches et deux couteaux). L’ensemble est
daté de la fin du IVe siècle av. J.-C.
Le casque complet avait été placé sur la hanche
gauche du défunt et recouvrait une partie de l’épée et
les hampes minéralisées des armes d’hast disposées le
long du corps (fig. 8). La paragnathide gauche, avec la
.
face externe tournée vers le haut était encore relié au
casque par les produits de corrosion, alors que celle de
droite, désolidarisée, gisait sous le timbre face contre
terre. Le casque est constitué d’une calotte en bronze et
de couvre joues trilobés en bronze et fer. Le timbre de
forme hémisphérique et le couvre-nuque sont faits
d’une seule pièce, tandis que le bouton sommital et les
charnières sont réalisés séparément. Le bouton est
creux, bombé, et ornée d’un motif ternaire. Il s’agit d’un
double triangle à faces concaves pointé au centre, un
motif élémentaire fréquent dans l’art celtique. Ce motif
qui correspond au cœur du triscèle est souvent utilisé
seul sur certaines fibules ou torques, mais aussi sur certains boutons de casques des Alpes orientales.
Si la faible épaisseur des couches de corrosion n’affectait guère la forme de l’objet, elle masquait en revanche totalement les détails de surface comme les décors, les traces de fabrication et d’utilisation (fig. 9). Un
premier examen permit d’identifier la présence de restes
organiques liés à l’objet lui-même ou à son environnement immédiat. Outre les fragments de bois provenant
de la hampe des lances et javelots qu’il recouvrait, on
note la présence de cuir minéralisé sur la surface interne
du protège nuque et du crochet de fixation en L du paragnathide droit. Ces traces de cuir appartiennent vraisemblablement aux lanières de la jugulaire. La mise en
évidence de cuir à l’intérieur du casque trahit en outre la
présence d’une garniture interne comme cela a aussi pu
être vérifié sur plusieurs exemplaires en fer provenant
du même ensemble. La calotte était en effet recouverte
d’une épaisse couche de malachite et d’azurite, de couleur vert et bleu. Or, on sait que la formation de ces
couches de corrosion en quantité importante est associée à la corrosion des alliages cuivreux en présence de
matières organiques.
La restauration a permis de rendre lisible la présence
de décors réalisés au repoussé sur les paragnathides et
les disques temporaux du timbre ou moulés comme
ceux qui ornent le bouton sommital et la base du timbre.
Le dégagement de la face externe de chaque paragnathide s’est avéré difficile à cause de la différence de dureté et d’adhérence entre les couches de corrosion du fer
provenant des rivets et les couches inférieures de corrosion du bronze contenant la surface originelle (fig. 10).
La restauration achevée, l’objet a été protégé par une
couche de vernis acrylique (ParaloïdT B72) et placé dans
un conditionnement adéquate à sa conservation. La tôle
de bronze des couvres joues est ornée de trois disques
moulurés, identiques à ceux des temporaux. Ils dessinent un triangle pointé vers le bas. Des ocelles estampés disposés horizontalement sous la charnière et en arc
241
Fig. 8 – Monterenzio Vecchia. Tombe 36, vue d’ensemble.
Fig. 10 – Monterenzio Vecchia. Casque, tombe 36. Paragnathide droit
avant restauration (à droite) et après restauration (à gauche)
(Cliché R. Bernadet).
Fig. 9 – Monterenzio Vecchia. Casque, tombe 36. Vue postérieure droite du timbre avant restauration (Cliché R. Bernadet).
.
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La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
de cercle sur les côtés soulignent les bordures supérieures et latérales. Deux ocelles isolés situés dans l’axe
vertical, entre les disques supérieurs, complètent une
composition relativement sobre. Les plaques sont maintenues par trois rivets en fer fixés au centre des disques.
Ils sont identiques à ceux du timbre. L’observation minutieuse des couches de corrosion des têtes des rivets,
effectuée sous loupe binoculaire a révélé la présence d’émail de couleur rouge. L’incrustation d’émail rouge sur
les têtes de rivets en fer est une technique maintenant
bien connues qui signale non seulement les casques en
fer ou en bronze et fer de l’Apennin mais aussi certains
rivets de poignée d’épée comme l’exemplaire de la
tombe 36. Le nettoyage a été réalisé de manière exclusivement mécanique. Une attention particulière a été requise pour le nettoyage des parties émaillées, compte tenu de la fragilité du matériau vitreux. L’émail dessine
sur la tête des rivets en fer des paragnathides des motifs
étoilés complexes, sur ceux du couvre-nuque et du temporal droit, un triangle à face concave qui rappelle singulièrement le motif du bouton sommital et sur le crochet du paragnathide droit un dernier motif constitué de
cercles concentriques (fig. 11). L’aspect général était dominé par la couleur jaune du bronze ponctuée de blanc
argenté (rivets en fer) rehaussée de rouge (émail).
Enfin, la restauration a permis de mettre en évidence des traces de réparation qui atteste d’un usage intensif. L’objet fut porté, malmené et grossièrement réparé. La charnière en bronze du couvre joue gauche, qui a
cédé, a été remplacée par une nouvelle attache en fer
fixée à la calotte par un rivet en bronze qui traverse le
centre de l’ancien rivet en fer (fig. 12). Les traces de
martelage visibles à l’intérieure de la calotte, indiquent
en outre que le timbre a été réalisé à partir d’une
Fig. 12 – Monterenzio Vecchia. Casque, tombe 36. Le casque après
restauration. Au centre de l’ancien rivet en fer est visible le rivetage de
réparation en alliage-cuiveux (Cliché R. Bernadet).
ébauche moulée à la cire perdue et mis en forme dans
un second temps par martelage, en alternance avec des
passes de recuits. Le polissage final de la surface externe
en aura fait disparaître toutes les irrégularités.
Le casque de la tombe 36 avec sa calotte en bronze et
ses paragnathides trilobées bimétalliques ne trouve pas
de comparaison immédiate dans la région. Il se distingue
du type classique à bouton étrusco-italique en bronze
(également nommé type de Montefortino) documenté
Fig. 11 – Monterenzio Vecchia. Casque, tombe 36. Têtes de rivet en fer à décors d’émail rouge : paragnathides (a), temporal droit et couvre-nuque
(b) et bouton du crochet en L du paragnathide droit (c) (Cliché R. Bernadet).
.
243
localement à Monte Bibele et à Bologne, par la forme
(timbre arrondi) et la technique (bouton rapporté, moulures simples et décor ternaire). Le bouton rapporté est
une caractéristique des productions celtiques et alpines
des Ve et IVe siècle av. J.-C. La réalisation en une seule
pièce du couvre-nuque et du timbre est en revanche un
trait distinctif de l’artisanat péninsulaire, qu’il s’agisse des
spécimens aussi bien en bronze qu’en fer (c’est à cette catégorie qu’appartiennent tous les casques en fer des
Apennins entre Marches et Ligurie). Les casques à bouton de type Montefortino, souvent équipés de paragnathides anatomiques, sont parfois associés comme les
exemplaires en fer à des couvre joues trilobées en bronze
ou bimétalliques. C’est le cas d’un des plus célèbres
casques de la nécropole «sénone» de Filottrano dans les
Marches, également équipé d’un porte cimier et pourvu
de rivets en fer. La forme nettement arrondie du timbre
rappelle l’aspect du casque en fer et bronze de Canosa
(tombe à hypogée de la Scocchera A, Pouilles), qui figure
avec sa riche décoration de corail parmi les chefsd’œuvre de l’art celtique. Plus probantes sont les similitudes avec un des casques de la nécropole ligure d’Ameglia (Ligurie). Comme l’exemplaire de Monterenzio, le
casque d’Ameglia en bronze est équipé de couvre joues
bimétalliques et le timbre est arrondi. Le bouton sommital réalisé séparément n’est pas conservé. La tombe 54
d’Ameglia est datée comme celle de Monterenzio de la fin
du IVe-début IIIe siècle av. J.-C. Il s’agit d’une sépulture
double qui contenait les restes de deux guerriers équipés
d’épées «celtique» de type La Tène ancienne. Un autre
point commun entre cette dernière nécropole et celles de
Monte Bibele et Monterenzio Vecchia réside dans le
nombre relativement élevé d’individus armés et casqués
(40% d’hommes armés) et une forte dominante des
casques en fer par rapport aux spécimens en bronze. La
présence de casques en bronze parmi les ensembles les
plus richement dotés en mobilier, à Monterenzio Vecchia,
à Monte Bibele, à Ameglia ou à Bologne, témoigne de
l’importance de ces armes et de leurs possesseurs.
2 – Le second exemple sur lequel nous souhaitons
attirer l’attention est un objet entièrement en fer. Il s’agit de l’épée avec fourreau de la tombe 32, une des rares
incinérations attestées sur le site. Le mobilier d’accompagnement comprend une quinzaine de récipients
constitués de plats, coupes et gobelets (vernis noir, pâte
bucchéroïde et pâte grossière). On trouve là aussi la kylix et le mortier caractéristiques des ensembles masculins de la région. Les effets personnels se limitent à
une fibule en fer et la panoplie d’arme. Celle-ci
comprend, outre l’épée, deux anneaux de suspension en
.
bronze et trois javelots de type pilum. La corrosion qui
couvre l’ensemble des objets indique en outre qu’ils ne
furent pas directement exposés à la flamme du bûcher.
Dans le cas contraire, leur surface aurait été préservée et
leur aspect faiblement altérée. La tombe est datée du début du IIIe siècle av. J.-C.
L’épée a été trouvée avec les rivets de la poignée en
place malgré la disparition des parties organiques. La
lame droite, à double tranchant et pointe effilée, mesure
environ 55 cm. Elle était légèrement dégagée de son
étui, alors que l’extrémité de ce dernier avait été repliée
le rendant impropre à tout usage. La lame est ornée de
deux lignes incisées qui courent de chaque côté, le long
de la nervure centrale.
Le fourreau d’épée de tradition celtique est un objet
composite en fer, formé de l’assemblage de différents
éléments. Les plaques de quelques dixièmes de millimètres d’épaisseur qui constituent la gaine sont montées
en force et maintenues par un ingénieux système de sertissage (la plaque la plus étroite est prise entre les gouttières latérales de la plus grande mais le jeu est réduit au
minimum de manière à maintenir une certaine tension).
À cela vient s’ajouter la bouterolle montée elle aussi en
force et la pièce de suspension fixée au revers par rivetage. Des pièces de renfort complètent parfois le montage. Enfin, il faut préciser que le fourreau est souvent
orné de motifs à caractères symboliques et apotropaïques. Il s’agit là d’une caractéristique de l’armement
laténien et une source d’information majeure pour la
connaissance et l’étude de l’art celtique.
Le fourreau de la tombe 32 présentait de nombreuses
altérations mécaniques sous formes de fissures, bris et
soulèvement de surface liées au processus de corrosion et
à son enfouissement. L’évaluation de l’extension et de la
pénétration de la corrosion s’est faite par sondages des
couches de corrosion sous loupe binoculaire et par l’observation des cassures. L’objet présentait une corrosion
généralisée à structure multicouche sur toute sa surface
(fig. 13). Si l’épée était peu minéralisée, la pénétration de
la corrosion était très importante en revanche au niveau
du fourreau. Un premier nettoyage des couches de corrosion permit d’identifier la présence de tissu minéralisé à
la surface de la bouterolle (fig. 14) et de bois sur la soie de
l’épée. Après avoir effectué une protection au cyclododécane des éléments organiques, l’objet a été stabilisé par
déchloruration au sulfite alcalin. Le nettoyage des
couches de corrosion jusqu’à la surface originelle a été effectué mécaniquement sous loupe binoculaire par microsablage de particules abrasives (microbille de verre de 70
à 90 mm) et achevé à l’aide de fraises diamantées montées
sur un micro-tour (fig. 15). La restauration d’un tel objet
Fig. 13 – Monterenzio Vecchia. Fourreau et épée, tombe 32, avant restauration.
Fig. 14 – Monterenzio Vecchia. Fourreau, tombe 32. Tissu minéralisé présent sur l’extrémité gauche de la bouterolle (Cliché R. Bernadet).
Fig. 15 – Monterenzio Vecchia. Fourreau et épée, tombe 32, après restauration (Cliché R. Bernadet).
Fig. 16 – Monterenzio Vecchia. Fourreau, tombe 32. Détail du décor gravé présent sur l’entrée (Cliché R. Bernadet).
.
245
est rendue difficile par l’extrême fragilité des couches de
corrosion supportant la surface originelle (les interventions de nettoyage et de consolidation à l’aide de résine
époxy sont menées conjointement). La restauration
achevée, l’objet a été protégé par une couche de vernis
acrylique (ParaloïdT B72) et placé dans un conditionnement adéquat à sa conservation.
La restauration a permis de préciser la morphologie
du fourreau et a révélé la présence sur la face antérieure,
près de l’embouchure, d’un décor ciselé. Le motif s’organise symétriquement de part et d’autre de la nervure centrale. Le thème est celui dit des «animaux fantastiques»
affrontés. Il s’agit de monstres serpentiformes à corps en
esse et gueule ouverte, communément désignés sous le
vocable de «lyres» par les spécialistes de l’art celtique
(fig. 16). Le nettoyage a montré une interruption du tracé à la hauteur de la tête des animaux. Il ne s’agit pas
d’une lacune mais de l’empreinte d’une pièce de renfort
aujourd’hui disparue. L’agrafe qui venait se refermer sur
les gouttières latérales était très certainement pourvue de
deux disques rappelant la tête et les yeux des animaux
qu’elle recouvrait. Des rinceaux curvilignes comblant les
vides complètent la composition et dessinent sous les animaux une palmette à trois branches. Si le motif est parfaitement visible sur le côté droit, à gauche il s’estompe
près de la base de l’animal, puis disparaît. Que le décor
soit resté inachevé paraît peu probable si l’on considère
les exemples similaires connus, il est plus simple nous
semble-t-il de supposer une érosion graduelle de la surface. Dans ces conditions, une ciselure peu profonde peut
ne laisser aucune trace. Les boutons qui signalent l’entrée
et l’extrémité losangée ajourée de la bouterolle sont ornés quant à eux de motifs circulaires simples.
Le fourreau d’épée de la tombe 32 trouve de nombreuses similitudes dans les ensembles contemporains
nord-alpins. Cette forme équipée d’un pontet muni de
longues attaches et d’une bouterolle courte avec extrémité losangée ajourée est caractéristique des armes de
la fin de La Tène ancienne, soit la période correspondant
à la fin du IVe siècle et au début du suivant. Elle est également attestée à Monte Bibele. Le décor, constitué
d’une paire d’animaux fantastiques aux corps sinueux et
étirés, surmontant une palmette à trois branches, trouve
également des comparaisons dans le domaine nordalpin. L’ensemble composé par les monstres serpentiformes et la palmette, laisse deviner, comme on l’admet
généralement, un masque où les yeux seraient figurés
par l’enroulement des mâchoires inférieures que réunit
parfois un arc de cercle. Ces figurations «végétalisées»
hiératiques qui évoquent tour à tour des animaux fabuleux (dragons, griffons, oiseaux...) et des masques sont
habituellement associées à la présence d’êtres divins.
Elles obéissent à des codes de représentation connus de
tous comme l’indique la diffusion de ces thèmes sur une
grande partie de l’Europe moyenne. C’est assurément là
un des traits les plus marquants de l’homogénéité culturelle qui caractérise les élites celtiques durant les cinq
derniers siècles avant notre ère. Les élites celtiques d’Italie du nord n’échappent pas à ce phénomène et
l’exemple des Cénomans montre que cet attachement
aux traditions septentrionales perdure au temps même
de la romanisation.
Avec ces deux exemples nous avons essayé de montrer l’importance de ce type de documents pour l’étude
d’ensembles funéraires où l’univers guerrier demeure
prégnant et où les armes représentent une part importante du mobilier déposé dans la tombe. La couche de
corrosion qui recouvre la plupart des objets en fer en modifient non seulement l’aspect mais aussi la structure interne. S’il est souvent possible d’identifier et même de dater sans trop d’effort, il en va différemment quand il s’agit
de détecter des traces de matériaux organiques ou encore
de reconnaître et suivre un décor jusqu’à ce qu’il devienne lisible. Les informations les plus minimes ont leur
importance dans la mesure où elles portent en elles les
renseignements qui permettront de préciser comment un
objet a été fabriqué et éventuellement réparé. Les traces
d’usures et de réparation qui caractérisent chacun de ces
objets permettent aussi d’en préciser le mode d’utilisation. S’agissant des Celtes d’Italie, nous savons de longue
date que ces populations se sont rapidement adaptées
aux usages locaux et n’ont conservé de leur héritage septentrional «laténien» que certaines catégories d’objets
emblématiques comme la parure et l’armement. L’attention portée à ces mobiliers paraît donc pleinement justifiée. Lors de la restauration des casques et des fourreaux
d’épée, une attention toute particulière a été portée à la
recherche de décors, aux traces de réparations et de mutilations rituelles (les épées/fourreaux des tombes 1, 3, 12,
16, 22, 26, 27, 28, 30, 32, 36 et trois casques composites
[fer/bronze] provenant de la tombe 1, 16 et 36). Toutes
ces pièces ont révélé la présence d’un décor plus ou
moins conservé. C’est à l’habilité du restaurateur que revient la tache de les rendre lisibles. Cette étape longue et
coûteuse, si elle constitue un préalable à l’étude et la publication des données de la nécropole celto-étrusque de
Monterenzio Vecchia, implique une collaboration étroite
entre archéologues et restaurateurs.
Renaud BERNADET ; Thierry LEJARS ; Venturino NALDI ; Stéphane VERGER ; Daniele VITALI
.
MEFRA – 120/1 – 2008, p. 183-270.
Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2007
Sites des activités archéologiques et des collaborations de l’École française de Rome en 2006-2007
.
195
Il s’agit d’une fondation très irrégulière et bien mal
conservée qui nécessitera un complément d’exploration
pour que l’on en comprenne la forme générale et la nature.
Après quatre années de recherches sur le terrain
– prospections géophysiques en 2004 et 2005 et sondages topographiques et stratigraphiques en 2006-2007
– l’année 2008 sera consacrée à l’étude du matériel et à
la préparation de la publication, en vue de l’élaboration
d’un nouveau projet d’investigation pour le prochain
plan de collaboration franco-albanaise à Apollonia.
Stéphane VERGER et François QUANTIN (EFA-EFR), Jean-Luc LAMBOLEY
et Philippe LENHARDT (MAE), Altin SKENDERAJ, Saïmir SHPUZA et Vasil BERETI
(Institut archéologique d’Albanie)
MONTERENZIO (PROV. DE BOLOGNE).
LA NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE DE MONTERENZIO VECCHIA : ÉTUDE ET CARACTÉRISATION
DU MOBILIER CÉRAMIQUE
Université de Bologna, École normale supérieure
(Ulm)-UMR 8546 du CNRS, École française de
Rome
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
a livré une quarantaine de tombes fouillées entre 2000 et
2005 et les restes plus ou moins bien conservés d’une
dizaine d’ensembles supplémentaires récupérés dans les
labours en 1988. Il faut ajouter à cette liste une série d’objets sans contexte précis trouvés dans les années 1880,
conservés au Musée Archéologique à Bologne. L’ensemble couvre une période relativement courte, que l’on
peut situer entre la fin du IVe siècle et le début IIIe siècle
av. J.-C. Il s’agit d’une phase particulièrement faste de la
civilisation celtique en Italie du nord, illustrée notamment par les grandes tombes fouillées au XIXe siècle à
Bologne. Installée sur le flanc sud-occidental de la colline, la nécropole est située à proximité d’un habitat
étrusque dont on commence à deviner l’importance mais
dont on ne connaît pour le moment ni l’ampleur ni les limites (fouilles en cours de l’Université de Bologne, sous
la direction de D. Vitali). L’examen préliminaire de la céramique indique toutefois que son implantation précède
l’installation de la nécropole celto-étrusque d’environ un
bon siècle. Le complexe archéologique, situé à une
trentaine de kilomètres au sud de Bologne, domine le
versant oriental de la vallée de l’Idice et fait face au
Monte delle Formiche qui se dresse au milieu d’une large
vallée définie par les cours de l’Idice et de la Zena. Côté
oriental, il domine la vallée du Sillaro qui ouvre sur la
Romagne. La proximité de la via Flaminia minor, une des
principales voies de communication antiques reliant la
région padane à l’Étrurie interne, conférait à cet établissement une importance stratégique de premier plan.
.
Sa position dominante et sa localisation à mi-chemin
entre la plaine du Pô au nord et les cols toscans au sud, en
faisaient une place remarquable bien que non fortifiée.
Cet établissement est contemporain de l’ensemble voisin
de Monte Bibele, également connu pour son importante
nécropole celto-étrusque. La proximité de ce dernier site
qui domine en amont le versant occidental de l’Idice
laisse deviner l’existence d’un réseau de castella relativement dense.
Nous ne reviendrons pas ici sur les principales caractéristiques de cet ensemble qui ont déjà été amplement
décrites dans les précédents comptes-rendus (cf. MEFRA
2001 à 2006). Nous nous limiterons à quelques rappels
concernant tout d’abord la composition de la population
funéraire dominée par les hommes armés qui représentent plus de 40% de l’effectif total. Il convient aussi
d’insister sur le nombre relativement élevé des individus
jeunes (une dizaine d’adolescents et d’enfants en bas
âge). Dans le précédent compte-rendu (Mefra 2007)
nous nous sommes plus particulièrement intéressés au
mobilier métallique, particulièrement abondant. À l’aide
d’exemples précis, nous avons essayé d’illustrer certains
aspects spécifiques des équipements militaires qui
combinent des éléments de tradition celtique (épées,
fourreaux et ceinturons, boucliers et lance) et centreitalique (casques et armes de jets). Cette double influence est également perceptible dans la parure même
si l’apport septentrional se limite cette fois à quelques fibules de typologie laténienne, en fer et en bronze. Dans
ce domaine, les références italiques dominent largement
(fibules en bronze ou en argent de type Certosa, colliers
en perles d’ambre, pendeloques à bullae, etc.) comme
pour les attributs féminins (quenouilles et fusaïoles pour
le travail de la laine) ou les ustensiles liés aux soins corporels (miroirs, strigiles, vases à parfum comme les
lécythes et les amphorisques, récipients en peau avec
embouchure en tôle de bronze, etc.).
L’importance de la composante étrusque, et plus
généralement étrusco-italique, est encore plus sensible à
196
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
travers les ustensiles et les rituels de table. Au total se
sont plus de 400 vases en céramique, entiers ou fragmentés, et une dizaine de récipients en tôle de bronze
qui ont été récupérés. C’est sur ce point que nous
souhaitons attirer maintenant l’attention.
Le mobilier céramique
La restauration des vases (nettoyage, consolidation et
remontage) est en voie d’achèvement et un certain
nombre de pièces sont déjà exposées dans les vitrines du
Musée archéologique «Luigi Fantini» à Monterenzio. Le
travail de restauration est réalisé avec le concours d’étudiants en conservation-restauration de l’Université de
Paris I, de la Haute École d’arts appliqués de La Chauxde-Fonds (Suisse) et de l’Université des Biens culturels de
Ravenne. Près de 75% des pièces sont d’ores et déjà dessinées et documentées. Les conditions pour une étude systématique du matériel céramique sont maintenant réunies. Cette étude prend pour point de départ les travaux
réalisés sur le matériel céramique de l’établissement voisin de Monte Bibele (E. Camurri et M. Della Casa, Université des Biens culturels de Ravenne). Ce travail en
cours de publication répond à deux objectifs : d’une part,
préciser la typologie des produits céramique de l’habitat
de Pianella di Monte Savino et de la nécropole voisine de
Monte Tamburino, et d’autre part d’établir un référentiel
régional typo-chronologique qui s’appuie à la fois sur les
associations de formes et les contextes de découvertes
(autres catégories de mobilier comme la parure et les
armes). Les mobiliers funéraires peuvent être considérés
comme autant d’ensembles clos dans la mesure où les
sépultures, les incinérations comme les inhumations,
renferment chaque fois les restes d’un unique individu.
L’objectif est de proposer un cadre qui rende compte de
l’évolution des formes en usage dans notre zone d’étude,
à savoir la vallée de l’Idice entre le Ve et le IIIe siècle
av. J.-C. La proximité géographique et surtout les similitudes typologiques entre le matériel mis au jour à Monte
Bibele et celui déposé dans les sépultures de Monterenzio
Vecchia – lequel se signale aussi par la présence de formes
nouvelles – justifient qu’on applique à ce dernier le protocole d’analyse précédemment mis au point.
Modalités d’étude
Le mode opératoire utilisé pour l’étude de la céramique de Monte Bibele reprend dans ses grandes lignes
le protocole d’analyse élaboré dans le cadre des travaux
du Centre archéologique européen du Mont Beuvray,
en France (Paunier et al. 1994). Diverses modifications et
.
aménagements y ont été toutefois apportés afin que
soient pris en compte les spécificités taxonomiques
propres à notre zone d’étude. L’analyse s’articule en
quatre phases : 1) classification technologique avec
caractérisation visuelle des différents types de pâtes et
subdivision des vases en classes; 2) classification morphologique et fonctionnelle, avec pour chaque classe une
subdivision des vases en formes fonctionnelles; 3) classification morphologique et stylistique, avec pour chaque
forme l’identification de types en tant que «catégories de
produits présentant les mêmes attributs» (Guidi 1994;
Peroni 1994); 4) recherche comparative. Le système
taxonomique utilisé est de type arborescent et les
classes, formes, types et éventuelles variantes, sont indiqués au moyen d’un simple code alphanumérique. La
méthode, éprouvée avec le matériel du complexe de
Monte Bibele, a permis de réaliser une typologie ouverte
qui laisse place à l’ajout de nouveaux types ou variantes
par simple extension de la codification. L’objectif est de
proposer un cadre complet et détaillé des diverses productions documentées à Monterenzio Vecchia et plus
généralement dans le bassin de l’Idice.
Caractères généraux du corpus céramique
Cinq classes céramiques sont distinguées : 1) céramique grossière (gobelets, olle, miniatures); 2) céramique dépurée ou semi-dépurée micacée grise, orange
ou «buccheroïde» (pâte rouge avec surface grise ou
noire); 3) céramique dépurée grise claire souvent avec
engobe noirâtre (coupes, plats, coupes à pied, mortiers,
vases à puiser, olle); 4) céramique dépurée claire, peinte
ou non (grandes coupes à pied, olle, cratères, cruches,
etc.); 5) céramique à vernis noir, simple ou avec décor
surpeint (coupes, kylikes, skyphoi, etc...).
Les décomptes des fig. 10 et 11 donnent un premier
aperçu de l’importance respective des différentes formes
et types de pâte du corpus des céramiques de la nécropole de Monterenzio Vecchia. On remarque d’emblée la
prépondérance des pâtes dépurées et semi-dépurées micacées par rapport aux autres types de pâtes. Concernant
les céramiques à vernis noir, on constate qu’elles sont
documentées dans la plupart des ensembles adultes par
un ou plusieurs exemplaires, et jusqu’à six dans un cas.
Il s’agit principalement de coupes et de kylikes de production volterrane. Cette dernière classe de matériel
laisse entrevoir d’intéressantes perspectives de recherche
qu’il importera d’approfondir. La série, en effet, se partage en deux groupes distincts qui se signalent le premier par une pâte globalement rosée avec un vernis nettement bleuâtre, le second par une pâte orangée à
197
Fig. 10 – Monterenzio Vecchia. Quantification des formes céramiques documentées à Monterenzio Vecchia (M. Della Casa).
Fig. 11 – Monterenzio Vecchia. Estimation de l’importance relative des classes céramiques documentées à Monterenzio Vecchia (M. Della Casa).
rose-orangée et un vernis noir ou brun-noir. Ces deux
groupes semblent également se distinguer par le style
différent des décorations imprimées – les estampilles –
sur le fond interne (décor à la molette, palmettes, fleurs
de lotus, voir fig. 12). On peut se demander dans quelle
mesure ces différences qui caractérisent deux types de
production, ne sont pas aussi l’indice d’une double origine. On peut aussi espérer qu’une étude minutieuse des
estampilles – combinaison de relevés graphiques traditionnels et de photographies numériques – permettra,
avec l’analyse comparative et la constitution de référentiels, d’individualiser des indicateurs de reconnaissance
objectifs – recherche de poinçons – ou pour le moins des
caractères stylistiques récurrents.
La chronologie
L’ensemble céramique de Monterenzio Vecchia permet d’aborder un point important, celui de la chro-
.
nologie des céramiques et leur évolution. Comme pour
Monte Bibele, les conditions sont réunies pour tenter un
phasage relativement précis. On peut pour cela s’appuyer sur les contextes funéraires et les associations céramiques, et cela d’autant plus facilement qu’il s’agit de
sépultures individuelles. Les risques de mélanges des
sépultures multiples, utilisées sur une période plus ou
moins longue, sont ainsi évités. Cette sériation sera
ensuite confrontée avec les données issues de l’étude des
autres catégories d’objets (les armes, les éléments de
parure et les accessoires du costume) et la chronologie
relative des sépultures, comme on peut la lire à travers
l’examen de la stratigraphie horizontale. Les premières
analyses montrent la très forte similarité qui existe entre
les séries de Monterenzio Vecchia et Monte Bibele.
Toutefois, si les deux ensembles sont synchrones, on
constate que la première ne couvre qu’une partie du
champ chronologique de la seconde. Les phases
anciennes (de la fin du Ve siècle av. J.-C. jusqu’au second
198
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 12 – Monterenzio Vecchia. Décors à la molette, cercles et palmettes imprimées sur le fond interne d’une coupe à vernis noir;
tomba 2 (photographie et reproduction graphique, M. Della Casa).
tiers du IVe) et récentes (second quart du IIIe siècle
av. J.-C.) de Monte Bibele ne sont pas représentées à
Monterenzio. Les ensembles conservés de Monterenzio
Vecchia – moins d’une cinquantaine de tombes contre
les 160 de Monte – semblent en effet dater dans leur majorité des dernières décennies du IVe siècle et du début
du IIIe siècle av. J.-C. Cette période se traduit aussi du
point de vue des rituels funéraires par une plus grande
perméabilité des Celtes aux usages funéraires étruscoitaliques. Si cette période est également bien documentée à Monte Bibele, la composition des mobiliers funéraires est en revanche plus sommaire, tant par le
nombre que par la qualité des vases (la tombes 116 exceptée). Le corpus céramique de Monterenzio Vecchia
diffère des ensembles voisins de Monte Bibele et de Bologne par un éventail de formes plus fourni et varié. La
série typochronologique de Monterenzio Vecchia devrait
donc constituer un important point de référence pour la
connaissance du faciès céramique de l’Apennin bolognais des IVe et IIIe siècle av. J.-C.
La composition des assemblages céramiques
Après avoir esquissé les grandes lignes de l’analyse
céramologique, nous voudrions nous arrêter sur la
composition des assemblages et le sens de ces dépôts.
Les sépultures d’adultes, masculines et féminines, sont
de loin les mieux pourvues en mobilier céramique.
Elles se caractérisent par le dépôt, à côté des objets de
.
parure et des effets personnels, d’un abondant service
de vases destinés à la préparation, à la présentation et à
la consommation de nourritures et de liquides. Le
nombre de vases varie entre 9 et 20 pièces, avec une
moyenne située autour de 15. Il s’agit de véritables services de table destinés à la célébration du banquet/
symposion (fig. 13). C’est là assurément un aspect important des usages aristocratiques de tradition grécoétrusque qui voyait dans la consommation collective du
vin, un des moments les plus significatifs de la vie
sociale des élites : le dépôt dans la tombe d’un service
de table ne témoigne pas seulement du rituel funéraire
du banquet ou de la dotation du défunt pour l’au-delà,
mais revêt aussi une valeur symbolique pour cette
communauté mixte où l’on voit Celtes et Etrusques
adopter et partager les mêmes usages. Pour enrichir et
compléter ce service nous trouvons aussi parfois des
instruments pour la préparation et la cuisson des
viandes (couteaux et broches) et des récipients métalliques (kyathoi, passoires, situle à deux anses avec
attaches à décoration plastique végétale et anthropomorphe; Vitali et al. 2006). Seule la tombe 36 dispose
de l’attirail complet, les chenets compris. Le mobilier est
toujours accompagné d’offrandes alimentaires (généralement des parties de grils costaux de porc qui ont été
placés sur les vases; d’autres restes osseux trouvés sur
le fond de la fosse laissent supposer l’existence de récipients ou de supports en matériau organique).
Alors que les armes, la parure et les objets de toilette
199
Fig. 13 – Monterenzio Vecchia. Tombe 5. Exemple d’un service de table complet. On observe la présence, exceptionnelle dans une tombe masculine
d’un skyphos, alors que ce type de vase caractérise normalement les sépultures féminines. Le défunt est par ailleurs un des rares hommes non armé
(dessin et cliché, M. Della Casa).
(strigiles, rasoirs, forces pour les hommes, fusaïoles, quenouilles, miroirs pour les femmes) sont placés au plus
près du corps – y compris pour les incinérations – le service de table est disposés à l’écart, à la droite du défunt.
Leur distribution se limite généralement à la partie
comprise entre la tête et la bassin ou encore le thorax et
le genou (fig. 14). Les vases, serrés les uns contre les
autres, dessinent une aire quadrangulaire qui permet de
restituer là encore un support en matériau périssable
– une table basse ou un coffre – sur lequel ils prenaient
.
place (fig. 15). Il est en revanche plus difficile d’observer
une division interne entre ustensiles à boire et vases à
manger. On trouve aussi parfois un vase isolé placé aux
pieds du défunt (une grande coupe dans la tombe 1 ou
encore un petit vase fermé à panse ovoïde dans la tombe
19).
Le service de table ordinaire se compose, pour un
adulte, de deux ou trois plats à pied, deux à quatre
grandes coupes (diam. d’ouverture de 13 à 16 cm), deux
ou trois coupes de taille moyenne (diam. 9 à 12 cm) et
200
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 14 – Monterenzio Vecchia. Tombe 27. Détail du matériel céramique. La situation de certains vases placés sous le corps du défunt
(deux coupes sous le fémur gauche et sous la
main droite, une coupe à vernis noir sous le
bassin et le bras droit et une seconde partiellement engagée sous l’humérus) permet de restituer la présence d’un support – un lit – en
matériau périssable sur lequel était étendu le
défunt et qui recouvrait une partie du mobilier
funéraire. Des aménagements de ce type ont
aussi été identifiés dans les sépultures 12, 14,
19 et 27 (cliché, M. Della Casa).
Fig. 15 – Monterenzio Vecchia. Tombe 1, reconstitution (le canthare étrusque coiffant l’olla apparaît en transparence sous le casque qui le recouvre;
conception et photographie, Sébastien Pons).
souvent une ou deux coupelles (diam. 6 à 8 cm) ainsi
qu’un grand contenant, en général une olla à deux
anses, plus rarement un cratère. On ne trouve en revanche aucune amphore contrairement à ce que l’on
peut observer dans les usages funéraires sénons des
Marches ou à Adria, en Vénétie. A ce répertoire de
formes, il faut ajouter une coupe à boire, une kylix pour
les hommes, un skyphos pour les femmes (avec de rares
exceptions, tombes 5, 21 et 22; sur la signification de
telles exceptions également constatées à Monte Bibele,
voir Vitali 1987). Des coupes à pied figurent dans un
tiers des tombes, leur nombre variant de un à trois
exemplaires. Le service à boisson comporte aussi parfois
un gobelet à puiser en terre-cuite – dans environ un
.
tiers des cas – dont la fonction paraît analogue à celle
des kyathoi en bronze. Enfin, il faut signaler la présence
de mortiers. Il s’agit d’une forme ouverte caractérisé par
un fond «a grattugia». La vasque, le plus souvent
simple, est parfois pourvue d’anses et de bec verseur.
Deux types de pâte sont distingués, les pâtes orangées
qui correspondent aux formes simples anciennes et les
grises plus complexes et évoluées. Ces vases liés à la préparation des aliments, devaient remplir ici une fonction
bien précise puisqu’on ne les trouve que dans les tombes
masculines. Leur présence n’est donc pas nécessairement liée au rituel du banquet. Cet usage, étranger au
rituel funéraire étrusque contemporain, a en revanche
probablement été hérité de leurs voisins Ombriens où
201
l’on trouve de nombreuses similitudes (par exemple la
nécropole de Montericco à Imola, Von Eles 1981).
Le vaisselier de base se présente en règle générale
comme un service double, voire triple. Si la duplication
du mobilier céramique est typique aussi de la plupart des
tombes de Monte Bibele, surtout au IVe siècle (avec
deux gobelets, deux plats, deux grandes coupes, deux
coupes de taille moyenne et parfois deux plus petites) le
triplement de certaines formes (plats à pied, grandes
coupes à vernis noir surtout, coupes moyennes, coupes
à pieds) paraît plus fréquent à Monterenzio Vecchia. La
duplication du service implique la participation au rituel
du banquet d’un second convive, le conjoint ou un
parent, qui s’unit ainsi au défunt. D’autres formes, rares,
sont également attestées comme les cruches (tombes 2,
5 et 16 avec deux exemplaires pour la dernière) et les
canthares (tombes 1, 2 et 7). L’amphorisque et l’askos
zoomorphe présentes dans les tombes 7 et 2 sont sans
équivalent à Monte Bibele et plus généralement dans la
région.
Si le cérémonial du banquet représente un moment
important du rituel funéraire, la généralisation de cette
pratique souffre toutefois d’exceptions notables comme
l’incinération 28 qui contient les restes d’un guerrier
adulte. L’unique vase déposé dans la tombe, un petit
pot fermé, était associé à un nécessaire de toilette. Ce
traitement particulier qui prohibe toute référence au
banquet, a également été observé à Monte Bibele. Il
n’est pas lié au rituel de la crémation puisque les deux
autres incinérations connues – les tombes 16 et 32 –
disposent de services complets. Les raisons de cette différence restent à éclaircir. On peut penser à un individu
de statut particulier même si la position de la tombe
n’en laisse rien paraître et que son équipement personnel – armes et nécessaire de toilette – ne le distingue en
rien de ses pairs.
La composition et l’abondance du mobilier céramique varient également en fonction de l’âge des défunts. Les tombes d’adolescents se signalent par un
nombre de vases plus restreint, une dizaine tout au plus.
On trouve là quelques unes des formes attestées dans les
tombes d’adultes comme le skyphos qui renvoie à l’univers féminin ou les gobelets en céramique grossière. Les
sépultures d’enfants ou de nouveaux nés se caractérisent en revanche par un mobilier extrêmement réduit
qui présente, à côté de quelques objets de parure, un ou
deux vases miniatures (voir MEFRA 2002). Il arrive aussi
que des vases miniatures figurent dans les mobiliers de
femmes adultes (tombe 2). Dans ce cas là, ils ne sont pas
mêlés aux autres vases mais directement associés au défunt, placés sur la poitrine ou près de la main.
.
Si la majorité des vases renvoient à l’univers du banquet, toutes les formes n’ont pas loin s’en faut une fonction alimentaire. C’est le cas des vases déposés à l’écart,
près des pieds (une coupe ou un petit vase fermé). Leur
proximité immédiate avec les instruments de toilette
permet d’envisager pour ces récipients un usage plus
probablement lié aux soins corporels. On peut le supposer aussi pour quelques formes particulières comme le
lekythos qui, d’ordinaire, contient l’huile ou le parfum lié
à la cérémonie funéraire (tombe 2). Il en va de même du
petit vase à corps globulaire fragmenté de la tombe 24,
semblable à ceux qu’on l’on trouve à Monte Bibele dans
les contextes féminins associés aux fusaïoles et aux
restes de quenouilles, ou encore le rasoir des ensembles
masculins.
Autour du cérémonial funéraire
On l’a vu, tous les vases n’étaient pas destinés au
service de table. Certains ont été utilisés comme vase à
parfum ou en relation avec les soins corporels. On peut
de la même façon se poser la question au sujet de certaines formes particulières comme les gobelets en céramique grossière. Ces récipients haut de 10 à 15 cm, avec
ou sans éléments de préhension, sont toujours fabriqués
de la même manière et se distinguent très clairement du
reste de la production. Leur aspect fruste est une
constante qui répond très certainement aux impératifs
du rituel funéraire lui-même. Si les vases liés aux soins
corporels sont placés à l’écart, il n’en va pas de même
des gobelets qui sont toujours associés au service de
table. Ils figurent dans toutes les tombes, exceptées celles
des enfants morts en bas âge. Ils sont généralement au
nombre de deux. À ces caractéristiques s’en ajoutent
d’autres qui confortent l’idée d’une utilisation distincte
du service de table. En effet, on a pu observer que ces
gobelets présentent aussi parfois à l’intérieur des traces
de brûlé et qu’ils sont fréquemment brisés au moment
du dépôt. Les morceaux sont selon les cas regroupés ou
dispersés. Les autres formes ne portent que très exceptionnellement des marques de bris volontaire. Dans
d’autres cas, le fond est simplement perforé et la partie
manquante jamais retrouvée (lacunes de forme plus ou
moins triangulaires ou losangées, fig. 16). On notera
enfin que ces gobelets de facture volontairement grossière trouvent une nouvelle fois des analogies dans les
usages funéraires ombriens de Romagne (par exemple,
la nécropole de Montericco à Imola) alors qu’ils paraissent absents des contextes funéraires étrusques padans. La nature de la pâte, le bris ou la perforation et les
traces de brûlé nous conduisent à rejeter l’idée de
202
Bolsena le attività svolte presso il laboratorio di archeologia
Chronique
Fig. 16 – Monterenzio Vecchia. Tombe 3. Gobelet
en céramique grossière avec lacune ancienne de forme losangée
sur le fond (cliché, M. Della Casa).
vases à boire et nous incite davantage à voir dans ces objets des ustensiles liés à la cérémonie funéraire (brûleparfum, etc.).
Cet aperçu des études céramologiques en cours permet de mesurer l’importance du corpus et d’illustrer l’étendue du répertoire des formes. Il permet aussi de préciser le rôle de la vaisselle domestique – la plupart des
formes sont en effet attestées dans l’habitat contemporain de Pianella di Monte Savino à Monte Bibele – dans
le processus qui les conduit dans la tombe, avec le défunt. Il convient aussi de rappeler que dans ce
domaine, les Boïens de l’Idice, pas plus que leurs
proches voisins de Bologne, ne semblent pas avoir cultivé la tradition des céramistes nord-alpins. La prépondérance du monde étrusque est en revanche particulièrement évidente dans les usages de table. Il conviendra
toutefois de s’interroger sur les variations constatées
dans la composition de certains services (service
complet, réduit ou absence). Il faut enfin insister sur les
rapports étroits qui lient certains usages particuliers (par
exemple concernant l’emploi du mortier ou des gobelets
à pâte grossière) au monde ombrien (à la nécropole de
Montericco à Imola déjà signalée, il faudrait joindre celle
de Colfiorito di Fologno, en Ombrie; Bonomi Ponzi
1997). Ces pistes de recherches rapidement esquissées
feront l’objet d’une enquête approfondie.
Le choix des récipients, leur fonction et leur mise en
scène dans la tombe, sont autant d’éléments à prendre
en considération. Il importera également de préciser les
modes de fabrication et l’origine des pièces exogènes (les
vernis noirs, les vases étrusques à figure rouge, les pâtes
claires de la côte haut-adriatique, etc.). L’analyse des
traces d’usures et de réparation visibles sur de nombreux
vases permettra aussi d’en préciser le mode d’utilisation.
Si les vases de la nécropole de Monterenzio Vecchia
n’ont pas restitués d’inscription contrairement à ceux de
Monte Bibele (à l’exception d’une coupe où l’on peut
lire les lettres SA) on trouve sur la plupart des grafitti
constitués de motifs géométriques, utilisés seuls ou
combinés avec d’autres de manière à former des figures
plus complexes (étoiles, pattes à trois branches, croix,
etc.). Ces marques qui sont souvent reproduites à l’identiques sur plusieurs vases de la même tombe, feront aussi l’objet d’un examen détaillé.
Mélissa DELLA CASA ; Thierry LEJARS ;
Venturino NALDI ; Stéphane VERGER ; Daniele VITALI
BOLSENA.
LE ATTIVITÀ SVOLTE PRESSO IL LABORATORIO DI
ARCHEOLOGIA : STUDI DI MATERIALI PROVENIENTI
DAGLI VECCHI SCAVI DELL’ÉCOLE FRANÇAISE
DE ROME A BOLSENA
École française de Rome, Università degli studi
di Roma-La Sapienza et Sopraintendenza
per i beni archeologici per l’Etruria meridionale
Nel 2006-2007, il Laboratorio di archeologia ha accolto sei studenti della Cattedra di Etruscologia ed archeologia italica (Università La Sapienza) che hanno
preparato le loro tesi, una di Specializzazione e cinque di
laurea triennale, sotto la direzione della Prof.ssa G. Bartoloni. Sono stati studiati diversi complessi di materiali
inediti, provenienti da saggi ed esplorazioni realizzati da
R. Bloch nel territorio di Bolsena o di incerta provenienza, di cui ne presentiamo una sintesi.
Martine DEWAILLY
.
MEFRA – 121/1 – 2009, p. 255-360.
Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2008
269
MONTERENZIO (PROV. DE BOLOGNE).
LA NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE
DE MONTERENZIO VECCHIA :
ARCHÉOTHANATOLOGIE ET PALÉOPATHOLOGIE
Université de Bologne, École normale supérieure
(Ulm)-UMR 8546 du CNRS et École française de Rome
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
a livré une quarantaine de tombes fouillées entre 2000 et
2005 et les restes plus ou moins bien conservés d’une
demi-douzaine d’ensembles supplémentaires récupérés
dans les labours en 1988. Il faut ajouter à cette liste divers
vestiges trouvés fortuitement dans les années 1880, qui
témoignent d’une nécropole beaucoup plus importante à
l’origine. Les premières études sur le matériel céramique
et le mobilier métallique indiquent une période d’utilisation relativement courte, que l’on peut situer entre la fin
du IVe siècle et le début IIIe siècle av. J.-C. Il s’agit d’une
phase particulièrement faste de la civilisation celtique en
Italie du nord, illustrée notamment par les grandes
tombes fouillées au XIXe siècle à Bologne. Installée sur le
flanc sud-occidental de la colline, la nécropole est située à
proximité d’un habitat étrusque (fouillé par l’Université
de Bologne, sous la direction de D. Vitali) dont on
commence à deviner l’importance mais dont on ne
connaît pour le moment ni l’ampleur ni les limites.
L’examen préliminaire de la céramique indique toutefois
que son implantation précède l’installation de la nécropole celto-étrusque d’environ un bon siècle. Le complexe
archéologique domine les vallées de l’Idice à l’ouest et du
Sillaro à l’est. La proximité de la via Flaminia minor, une
des principales voies de communication antiques reliant
la région padane à l’Étrurie interne, conférait à cet
établissement une importance stratégique de premier
plan. Sa position dominante et sa localisation à
mi-chemin entre la plaine du Pô au nord et les cols
toscans au sud, en faisaient une place remarquable bien
que non fortifiée. Cet établissement est contemporain de
l’ensemble voisin de Monte Bibele, également connu
pour son importante nécropole celto-étrusque.
Nous ne reviendrons pas ici sur les principales caractéristiques de cet ensemble qui ont déjà été amplement
décrites dans les précédents comptes-rendus (cf. MEFRA,
2001 à 2006), ni sur les principales catégories de mobiliers
qui ont aussi fait l’objet d’une présentation sommaire
dans les précédents numéros (cf. MEFRA, 2007 à 2008).
Nous nous limiterons au rappel de quelques faits importants qui font aussi l’originalité d’un tel ensemble. Signalons tout d’abord l’abondant matériel métallique qui
provient pour l’essentiel des équipements militaires. C’est
là que se concentre l’essentiel du mobilier de tradition
celtique (épées, fourreaux et ceinturons, boucliers et
lance) alors que dans les autres domaines les influences
étrusque et italique restent prégnantes (armes défensives,
parures féminines, nécessaires de toilette, ustensiles et
services de table). La population funéraire est dominée, et
c’est là assurément une des originalités du site, par
l’importance des hommes armés qui représentent plus de
40% de l’effectif total. Il convient aussi d’insister sur le
nombre relativement élevé des individus jeunes (une
dizaine d’adolescents et d’enfants en bas âge). C’est sur ce
point, par le biais de l’enquête anthropologique, que nous
souhaitons attirer maintenant l’attention.
Cette contribution a pour objectif de montrer
comment le travail a été mené et d’en présenter les principaux résultats. L’enregistrement des données in situ,
commencé par P. Charlier (2000 à 2003), a été poursuivi
par C. Gentili (2004 et 2005). La fouille menée en collaboration avec les archéologues répond aux exigences de
l’anthropologie de terrain développée par Henri Duday
(fouille, relevé et démontage des restes osseux,
Duday 1990 et 2005), tandis que l’étude post-fouille se
fondait autant sur la détermination de constantes
physiques (sexe, âge, stature) que la recherche de variations anatomiques et de lésions pathologiques
(Crubézy 1999; Charlier 2005 et 2008). La présence du
paléopathologiste sur la fouille même et sa participation
active aux diverses phases de travail a permis de développer une véritable «paléopathologie de terrain» autorisant le recueil de calcifications biologiques in situ
(fig. 17), l’observation de lésions sur des restes particulièrement friables dont la conservation n’aurait pas
été possible jusqu’au laboratoire, et la réalisation de
prélèvements dirigés à visée toxicologique, anatomopathologique et parasitologique.
Caractéristiques physiques :
âges et statures des défunts
Un total de 40 individus (37 inhumations et 3
crémations) a été exhumé depuis 1988 (tableau 1). La
morphologie des sépultures correspond grossièrement à
une fosse rectangulaire de 2,50 mètres de long sur 1,5 de
large. La profondeur est variable et dépend du niveau
d’arasement. Le corps est étendu sur le dos, la tête au
Nord-Est, et plaqué contre la paroi rocheuse sur son côté
gauche. Des traces de coffrage en bois de la tombe et de
planche placés sous le cadavre ont quelquefois été observées (pour une description plus complète de l’aménagement de la tombe, voir les Chroniques, publiées dans les
MEFRA 2001, 2002 et 2003).
270
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 17 – Monterenzio. Calcifications carotidiennes isolées
sur le squelette du sujet MV 31.
Pour les quarante sujets de Monterenzio Vecchia, on
dénombre : trente-sept individus inhumés et trois
crémations (plus une quatrième non conservée), correspondant à vingt-sept adultes certains, un adulte
probable et onze immatures. La détermination sexuelle
suit les critères définis par Jaroslav Bruzek (Bruzek
1991) où seul le bassin a été pris en compte. Concernant
les autres données anthropologiques physiques, l’évaluation de l’âge au décès est réalisée selon les
recommandations de Denise Ferembach tenant compte
du degré de maturation des cartilages de croissance, de
synostose crânienne, d’usure occlusale, d’arthrose, etc.
(Ferembach 1979). Enfin, la détermination des modes de
crémation a été réalisée selon la méthode de P. Shipman
(Shipman 1984). Quatorze sujets sont anthropologiquement masculins. Trois individus sont considérés
masculins sur la base du mobilier archéologique associé.
Dix individus sont anthropologiquement féminins. Le
sexe de treize sujets n’a pu être déterminé (crémations
et immatures principalement).
TABLEAU 1 – Répartition anthropologique des sujets
de Monterenzio Vecchia (les individus de plus de 16 ans
reprennent les sujets de 16 à 45 ans et ceux de plus
de 45 ans, plus les sujets adultes difficilement classables,
c’est-à-dire dont on peut seulement dire qu’ils ont plus
de 16 ans)
Sexe
< 16 ans
16 – 45 ans
> 45 ans
> 16 ans
Femmes
–
2
8
10
Hommes
–
10
4
14 + 3
11
–
1
1+1
Indéterminable
Si le monde des morts ne reflète pas forcément celui
des vivants, on peut tout de même noter que dans cette
nécropole, une majorité d’hommes meurent à un âge
adulte jeune (16-45 ans), tandis qu’une majorité de
femmes meurent à un âge adulte mature (après 45 ans).
Une telle distribution s’explique classiquement par des
faits de guerre qui fauchent la vie des hommes jeunes,
les décès féminins avant 45 ans étant principalement
dus aux complications des grossesses.
La stature moyenne des hommes a été évaluée à
170,3 cm (à partir de 13 individus), contre 162 cm pour
les femmes (à partir de 10 individus), soit un échantillon
total d’examen de 23 sujets sur 40 (la stature de chaque
individu a été mesurée selon les tables anatomiques de
Trotter et Gleser [Trotter, 1952], à partir des mensurations des os longs complets). Il existe un net dimorphisme sexuel puisque 8,3 cm séparent les valeurs des
deux genres sur le site.
Archéothanatologie
L’étude taphonomique des restes inhumés vise à
préciser, par un examen rigoureux de la position des
ossements, la manière dont les défunts ont été placés
dans la tombe. Cette démarche permet de dégager les
traits marquants, accidentels ou intentionnels, et de
rechercher au-delà des faits individuels les éléments
récurrents qui nous renseignent sur les choix opérés par
les membres de la communauté. L’analyse a permis
d’isoler un certain nombre de constantes qui ouvrent
sur une véritable typologie comportementale.
Conservation du matériel
Les sépultures fouillées entre 2000 et 2005 n’ont pas
été bouleversées ou altérées, et dans la plus grande
partie des cas il est possible d’apprécier les connexions
anatomiques. Il est intéressant de remarquer, à ce titre,
la présence des patellas en place, dans presque toutes les
sépultures. Habituellement, avec la décomposition en
espace vide les patellas tendent à se détacher et souvent
glissent le long des tibias ou sur les côtés, mais ces
phénomènes sont très variables et dépendent de la position des membres, du degré de rotation du fémur et des
autres éléments qui peuvent interagir. Le terrain n’est
pas particulièrement acide et cela a sûrement favorisé la
bonne conservation du matériel ostéologique. Malgré
cela, il faut signaler dans certains cas l’absence complète
de plusieurs os comme les phalanges des mains ou des
pieds. Si la perte des petits os est assez fréquente, il n’en
va pas de même des os longs ou de certaines parties
anatomiques comme le thorax des inhumés des tombes
271
19 et 31 où il n’a été trouvé aucune trace des côtes et du
sternum. L’hypothèse d’une réduction ou de manipulation étant exclue, nous sommes tentés d’attribuer la
cause de leur disparition à l’acidité des fluides de
décomposition, souvent destructive pour les os. Il faut
ajouter à cela l’action corrosive du mobilier environnant, en particulier des objets en fer.
Échantillons sélectionnés pour l’analyse
22 tombes correspondant à 20 adultes (8 femmes et
12 hommes) et deux adolescents ont pu être étudiées de
façon systématique. Ont été exclus de cette évaluation
les tombes 11 et 34, qui ont été détruites, ainsi que les
quatre incinérations (tombes 6, 16, 28 et 32). Les inhumations d’enfants (tombes 13, 17, 18, 23, 24, 29, 33, 35,
37) considérant qu’il est souvent difficile d’évaluer la
position exacte des ossements du fait de la labilité des
connexions anatomiques, n’ont pas été pris en compte à
ce stade de l’étude. Seules deux d’entre elles ont été
retenues dans les décomptes finaux, dans la mesure où
le caractère examiné s’est révélé probant.
Position de la tête
15 des 31 sépultures examinées montrent une nette
inclinaison latérale gauche du crâne (t. 1, 2, 5, 7, 8, 10,
11, 19, 22, 26, 27, 31, 33, 36, 37) et 7 sont en position
axiale (4, 9, 15, 20, 21, 29, 30). La tête est tournée vers
la droite dans un cas seulement (14) et 8 sont indéterminés (3, 13, 17, 18, 23, 24, 25, 35). Sont inclues ici les
enfants, même si, dans ce cas, l’inclinaison de la tête a
simplement été déduite de la position de la mandibule et
de la face d’apparition des os crâniens; l’absence de
calcification des os de la zone cervicale ne permet pas
une évaluation correcte (Duday 2007 : 105).
Sur la base des résultats obtenus nous pouvons
exclure l’éventualité d’un mouvement accidentel
survenu après le dépôt du corps ou causé par l’effondrement de la sépulture. On peut en revanche supposer que
l’inclinaison de la tête vers le côté gauche résulte d’un acte
intentionnel qu’il faut situer au moment de l’inhumation.
du bassin et le déplacement de la colonne vertébrale
sont les principaux indicateurs retenus.
En ce qui concerne les membres supérieurs, le
mouvement de rotation, qui touche plus particulièrement les humérus, a été constaté dans les tombes 8, 9,
17, 22, 26, 27 et 30. La tombe 22 est un exemple intéressant puisque que la rotation latérale, provoquée par la
présence d’un vase placé sous l’extrémité distale de
l’avant-bras, a entraîné la totalité du membre (fig. 18).
Le cas le plus fréquent, lié au bras droit, est l’indice d’un
important espace vide de ce côté. La rotation du membre
gauche n’est attestée que dans deux cas seulement
(tombes 26 et 27). Cela s’explique dans la mesure où les
inhumés n’étaient pas directement placés contre la paroi
de la fosse. La fréquence avec laquelle ce phénomène se
vérifie pour l’humérus ne laisse aucun doute quant à
l’existence de vides dans l’environnement immédiat du
défunt.
L’ouverture du bassin a pu être vérifiée chez tous les
adultes examinées. Ce critère est le principal indicateur
d’espace vide de décomposition. La même recherche a
été effectuée pour les sépultures d’enfants mais, comme
on pouvait s’y attendre, l’enquête n’a pas fourni de bons
résultats soit en raison de la mauvaise conservation des
restes osseux soit parce que l’absence de calcification a
empêché une appréciation correcte de ce critère.
Le déplacement de la colonne vertébrale est une
autre caractéristique des sépultures en espace vide. Cela
se traduit par la formation de segments vertébraux, en
parfaite connexion anatomique, distincts d’autres
parties déplacées. Dans huit sépultures, sept adultes et
un adolescent, l’alignement caractéristique de la colonne
vertébrale présente un tracé sinueux (les tombes 7, 30 et
36, la tombe 2 dont subsiste seulement la partie cervicale, et enfin les tombes 10, 12, 19 et 27, qui sont plus
Les ossements trouvés en dehors
du volume initial du cadavre
Ce phénomène multiforme concerne toutes les
parties du squelette. La mise en évidence de ces déplacements induit la présence d’espaces vides au moment de
la décomposition. Les os désarticulés se meuvent alors
en fonction des vides, des pendages et des contraintes
occasionnées par les objets et obstacles environnants.
Cela se traduit par des déplacements et des changements
d’orientation. La latéralisation de l’humérus, l’ouverture
Fig. 18 – Monterenzio. Le sujet de MV 12 en cours de dégagement.
272
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
particulièrement affectées dans la zone correspondant
au segment convexe de la lordose lombaire). Dans les
cas où les individus présentaient une position axiale des
segments vertébraux, le déplacement partiel d’éléments
isolés a fréquemment été constaté. Ce phénomène
dépend des mécanismes qui agissent au niveau des
disques intervertébraux pendant la décomposition en
espace vide.
Les anomalies fréquemment constatées au niveau
du rachis confirment une fois encore que la décomposition s’est effectuée en espace vide. Dans certains cas
particuliers la disposition anormale des vertèbres
indique que le corps se trouvait surélevé par rapport au
fond de la fosse. Ce constat répété vient confirmer
l’hypothèse déjà avancée de la présence d’une litière
aménagée ou d’un brancard constitué uniquement de
matériaux périssables. C’est ce qu’indiquent également
les vases qui ont été parfois placés sous le corps du
défunt (tombes 1, 4, 20 et 32). Ont-ils été utilisés pour
caler la planche comme ce fut certainement le cas de
pierres trouvées au fond des fosses 7 et 36? Nous ne
saurions l’affirmer, mais peut-être vaut-il mieux
imaginer dans ce cas de véritables supports en matériau
périssable.
Contraintes exercées sur le corps et effets de paroi
Les contraintes exercées sur le corps sont
nombreuses et diverses. Il faut signaler en premier lieu
la «médialisation» de l’humérus avec rotation vers
l’intérieur de la cage thoracique, parallèlement à la
colonne vertébrale, tandis que la scapula se présente en
vue postérieure et la clavicule glisse de manière à s’aligner le long du rachis. L’échantillon examiné comprend
des adultes et des adolescents (tombes 2, 7, 12, 19, 20 et
31). Dans ce cas, il a été nécessaire d’analyser chaque
situation pour pouvoir déchiffrer la nature du phénomène et repérer les particularités comme les exceptions.
La première remarque est liée au fait que la médialisation de l’humérus caractérise avant tout les ensembles
féminins. La tombe 12 qui appartient à un individu
masculin, est l’unique exception. Si ce phénomène intéresse principalement les tombes de femmes, il ne s’agit
nullement d’une prérogative absolue, dans la mesure où
les exceptions féminines ne manquent pas (tombes 4, 9
et 14).
La mise en évidence de ce phénomène induit l’existence d’un élément contraignant qui a conditionné la
position définitive des membres supérieurs. Dans ce cas,
il ne s’agit pas de la paroi de la fosse ou de la structure
protectrice en bois, mais plus probablement d’un vêtement, un habit ou un linceul, très serré qui enveloppait
le corps de la défunte. L’échantillon est cependant trop
faible pour que l’on puisse généraliser ce trait et en faire
un marqueur spécifiquement féminin. Que les femmes
aient été vêtues et parées ne fait aucun doute comme
l’indiquent les bijoux trouvés au niveau du cou, des
épaules et de la tête. On ne trouve en revanche aucun
élément de ceinture et les parures annulaires, de bras et
de jambes, font complètement défaut.
La rotation interne de l’humérus est liée à la position de la main et dépend par conséquent de la position
du membre tout entier. Les mains, malgré un état de
conservation souvent partiel, n’en livrent pas moins de
précieuses informations. Elles sont souvent placées sur
les hanches. Dans certains cas, cette situation ne
s’observe que pour la main droite, par exemple dans les
tombes 2, 19, 20 et probablement aussi en 7 (les mêmes
que précédemment), alors que dans les tombes 12, 21 et
30 c’est la main gauche qui est posée sur la hanche. Seul
le défunt de la tombe 31 avait les deux mains posées sur
les hanches.
Le dernier point intéresse la position des pieds. Le
calcanéum et le talus (talon et astragale) se présentent
en vue latérale indiquant par là qu’ils ont subi, par
rapport à la position anatomique normale, une latéralisation. Ce mouvement a entraîné le pied en entier, y
compris les métatarses qui apparaissent en connexion et
sont orientés vers l’axe médian intérieur. Ceci semble
impliquer la présence d’un élément qui a contribué à
maintenir les os du métatarse dans leur position initiale
malgré la rotation du pied. Cette situation n’est pas
conforme aux règles de la décomposition en espace vide,
puisque les os du pied tendent habituellement à se disloquer du fait de la labilité des articulations, à moins de
supposer qu’ils aient été maintenus ensembles par un
élément contraignant. Sur les 22 cas examinés, ce
phénomène est attesté 8 fois (tombes 2, 4, 8, 10, 21, 22,
30 et 36), 2 sont douteux (tombes 9 et 15), 3 paraissent
bouleversés (tombes 5, 12 et 27) et 9 n’ont pu être déterminés (tombes 1, 3, 7, 14, 19, 20, 25, 26 et 31). Les
ensembles douteux sont ceux pour lesquels il existe des
indices de probabilité, mais qui peuvent également être
imputés à d’autres facteurs comme les objets déposés à
proximité. Le groupe des «indéterminés» est constitué
des ensembles où les os du pied sont complètement absents (tombes 14, 26) ou présents en nombre insuffisant.
Le fait que le phénomène ait été constaté dans la
majeure partie des cas (les enfants ne sont pas inclus)
indique qu’il s’agit donc d’une situation plus normale
qu’insolite, d’autant plus si l’on considère que la récupération des os de petites dimensions est toujours très
problématique.
273
Nous pouvons proposer différentes hypothèses pour
expliquer cette contrainte, mais la plus plausible et la plus
simple est que les pieds des défunts étaient chaussés au
moment de l’inhumation. Cette situation indique donc la
présence d’un comportement rituel qui trahit le soin et
l’attention portée aux disparus. Pour autant, le rôle de la
décomposition des pieds est un phénomène encore mal
connu, en raison de la variabilité des situations et de la
petite taille des ossements qui favorise des déplacements
de toutes sortes (il faut tenir compte de la morphologie des
chaussures mais aussi de l’activité des animaux fouisseurs
qui occasionnent parfois d’importantes perturbations).
Verticalisation des clavicules
Ce phénomène implique l’ensemble formé par la
clavicule, l’humérus et la scapula, autrement dit l’épaule
toute entière. C’est un bon indicateur pour déterminer
l’espace de décomposition. Il est provoqué par une
compression transversale au niveau de l’épaule et
touche suivant les cas un seul ou les deux côtés à la fois.
Cela provoque la rupture des ligaments de l’épaule avec
pour conséquence le rapprochement des clavicules qui
viennent se placer contre la colonne vertébrale, la rotation de l’omoplate qui se met en position oblique par
rapport au plan d’appui et la médialisation des humérus.
Ce phénomène peut s’interpréter de différentes
manières. Il peut s’agir d’un dépôt en pleine terre avec
une forte pression des sédiments de remplissage ou en
espace vide avec des éléments contraignants (cercueil
étroit, linceul, etc.). Il convient donc de prendre en
compte l’ensemble des informations archéologiques, en
particulier celles qui concernent les caractéristiques de la
fosse et de son contenu.
Ici, les sépultures où la verticalisation de la clavicule
est manifeste sont au nombre de 9, 10 autres sont indéterminables et 3 présentent la clavicule en position
parfaitement horizontale. Le cadavre est toujours placé
le long de la paroi orientale qui constitue de ce fait une
limite infranchissable. Ce n’est donc pas un hasard si le
phénomène se vérifie exclusivement sur le côté gauche
c’est-à-dire celui correspondant justement à la limite
orientale de la fosse (ou plus exactement du coffre funéraire). Suivant les cas, l’inclinaison de la clavicule varie
plus ou moins fortement. Elle dépend d’une part de
l’écart qui sépare le cadavre de la paroi et d’autre part
des éléments du mobilier comme les armes qui sont
fréquemment placées le long du défunt, sur le côté
gauche. Seul l’inhumé de la tombe 5 présente une clavicule verticale parfaitement parallèle au tracé de la
colonne vertébrale. L’ampleur de la contrainte est également perceptible dans la position du bras gauche.
Bilan taphonomique
L’examen des restes osseux du complexe sépulcral
de Monterenzio Vecchia a permis de montrer la
récurrence d’un certain nombre de caractères taphonomiques. Ces marqueurs sont des indices précieux qui
ouvrent sur une nouvelle lecture des gestes funéraires.
Ils nous renseignent sur les comportements des
membres de la communauté et suppléent les carences de
l’enquête archéologique traditionnelle en livrant de
nouvelles hypothèses qui viennent confirmer ou
infirmer les analyses antérieures. Posséder de nouvelles
méthodes d’interprétation signifie avoir davantage de
possibilités pour approcher une meilleure compréhension du contexte funéraire.
Parmi les inhumés de la nécropole de Monterenzio
on a pu relever que la rotation de la tête des individus
adultes vers la gauche survient dans près de la moitié
des cas. Il convient de se demander si cela est dû au
hasard, ou traduit un geste intentionnel, et dans ce cas,
quel sens faut-il lui donner? La position des os du pied,
en connexion partielle et tourné vers l’intérieur, illustrée par l’individu de la tombe 36, ne représente pas un
cas isolé dans le contexte de la nécropole. Des positions
analogues caractérisent pas moins de 8 autres inhumés;
dans les autres cas, ce phénomène n’est tout simplement
pas démontrable en raison des perturbations. On peut
donc supposer dans un certain nombre de cas que les
individus étaient habillés et chaussés.
Un autre type de contrainte est la médialisation de
l’humérus qui a été constaté dans près d’un tiers des
cas, un phénomène qui intéresse principalement les
sujets de sexe féminin. Cette situation pourrait indiquer un comportement rituel spécifique qui concerne
principalement les femmes. Cela peut résulter de la
présence d’un cercueil ou d’un habit particulièrement
serré qui enveloppait complètement le corps de la
défunte. Pour aller plus avant dans notre questionnement quant à la nature de ce costume, il importera
d’examiner en détail les données iconographiques
contemporaines.
L’analyse taphonomique, en questionnant chacune
des composantes anatomiques et en relevant les indices
de déplacements, de compressions, de perturbations,
etc., livre des information essentielles qui permettent
de reconstituer certains aspects concernant les modalités d’inhumation. Elle permet de faire la part des
choses entre ce qui relève de l’accidentel et ce qui est
de nature intentionnelle. Elle permet de restituer une
gestuelle funéraire qui devra être confrontée avec les
autres données issues de l’étude du contexte et du
mobilier.
274
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Études ostéo-archéologiques
La paléopathologie, c’est-à-dire la recherche de
lésions pathologiques sur les restes humains provenant
de fouilles archéologiques, participe, comme l’anthropologie physique, à la reconstitution de l’état de santé
des populations du passé, mais répond également à
une problématique sociologique : elle apprécie le degré
d’invalidité des individus (évaluant ainsi la prise en
charge médicale et/ou sociale des infirmes); elle
diagnostique des maladies liées au contact avec
certains animaux (brucellose pour les ovins ou les
caprins, etc.) ou à certaines conditions climatiques
(paludisme, bilharziose, etc.); elle met en évidence des
maladies héréditaires qui permettent de poser des liens
familiaux entre squelettes; elle peut permettre de
déterminer le sexe d’un individu grâce à l’observation
de maladies spécifiques d’un genre (fibrome utérin
calcifié, par exemple) lorsque le matériel archéologique
reste non spécifique. L’étude qui suit intègre les
ensembles osseux récupérés en 1988 (notés alphabétiquement).
Paléodontologie
Cette étude a porté sur 13 sujets masculins et 10
sujets féminins dont la dentition était analysable.
L’examen a été systématique : ont été relevés le nombre
de pertes dentaires ante-mortem (Steckel 2002), le degré
d’usure occlusale selon l’échelle de Brothwell (Brothwell 1972), la fréquence des caries, abcès et cassures
dentaires, puis les anomalies de répartition et de
morphologie des dents.
L’usure occlusale moyenne par individu était de 3+
pour les hommes et 4+ pour les femmes (cette différence
s’expliquant par l’ancienneté relative plus importante
des femmes vis-à-vis des hommes dans la nécropole). De
la même façon, les pertes dentaires ante-mortem étaient
nettement plus importantes sur les squelettes féminins
(en moyenne 5,5 dents perdues ante-mortem par individu, mais 1,1 dent par homme et 11,3 dents par femme,
soit un rapport de 1 à 10!).
Les caries étaient plus fréquentes en position postérieure (2e prémolaires et molaires, tant mandibulaires
que maxillaires) avec en moyenne 2 caries par individu
et à nouveau une prédominance féminine des lésions
(1,5 carie par homme contre 2,9 caries par femme). Ces
valeurs indiqueraient une économie mixte ou agropastorale (Cohen 1984). Il existait en outre 0,3 abcès
apical par individu, tous sexes confondus : cette faible
fréquence, en comparaison avec l’important nombre de
caries, pourrait s’expliquer par des extractions dentaires
dirigées empêchant le développement de complications
infectieuses loco-régionales.
Un seul cas d’activité dentaire extra-alimentaire a
été noté; il intéressait l’individu MV 7, une femme
adulte mature. L’examen paléopathologique complet
n’a pas permis de déterminer avec plus de précision
l’activité de ce sujet.
Il existait 0,4 cassure dentaire par individu, tous
sexes confondus. Il est très probable que l’importante
fragilité dentaire due aux fréquentes caries au sein de
cette population en soit un facteur favorisant. L’examen
des restes archéo-zoologiques a montré (Méniel 2003)
l’existence d’une importante fragmentation osseuse au
niveau des découpes. D’autre part, la répartition anatomique des cassures dentaires diffère entre sexes : dents
postérieures touchées de façon prédominante chez les
hommes; arcade dentaire antérieure chez les femmes
(bloc incisivo-canin). Ceci pourrait impliquer des mécanismes différents d’apparition des cassures entre sexes :
fragments osseux ou cristallins dans la nourriture pour
les uns, traumatismes directs pour les autres, par
exemple.
Des dépôts de tartre dentaire ont été mis en
évidence chez de nombreux sujets (en excluant les individus crémés et édentés : MV 4, MV 7, MV 9 et MV 14).
S’il n’existait pas de face dentaire prédominante, on
notait en revanche que l’importance du dépôt de tartre
augmentait avec l’âge. Il existait 9 femmes atteintes sur
10 et 11 hommes sur 17, soit une nette prédominance
féminine. Cette différence était-elle d’origine alimentaire (régime féminin plus riche en résidus inframillimétriques adhérents aux surfaces occlusales?
aliments de plus grande viscosité?) ou liée uniquement
à la répartition démographique?
Parmi les malpositions dentaires, une dent 33 hors
de l’arcade dentaire a été observée chez deux sujets
contigus de la nécropole : MV 1 et MV 2, suggérant un
regroupement familial entre ces deux individus. On sait
en effet que la transmission des malpositions dentaires
peut suivre les lois de l’hérédité, donc se transmettre de
génération en génération (Hadjouis 1999).
Deux cas d’extension inter-radiculaire de l’émail
ont été isolés, pour 2 squelettes contigus (MV 21 et
MV 22). Compte tenu du caractère épigénétique
connu de ce trait anatomique et du regroupement des
2 cas au sein de la nécropole, il est tentant de
proposer un lien familial fort entre les deux individus
(Crubézy 1999). Néanmoins, certains sujets totalement
édentés pourraient avoir possédé ce caractère discret,
mais la chute des dents nous prive désormais de son
identification.
275
Paléopathologie
Maladies dégénératives
L’ensemble des lésions dégénératives (arthrose) a
été détecté et relevé, puis coté en fonction de l’importance des ostéophytes et de la présence de géodes et
d’éburnation (sévérité de 1 à 3). À travers cet indicateur,
il a été possible de déterminer l’intensité de l’activité
physique développée par l’individu au cours de sa vie
quotidienne, principalement lors de ses activités professionnelles. Il est ainsi apparu que :
– L’atteinte prédominante est l’articulation coxofémorale, ce qui n’a rien d’étonnant dans un contexte
montagneux; cette articulation est en effet très sollicitée
lors du gravissement et de la descente des pentes. Une
autre topographie touchée d’une façon prédominante
par les lésions dégénératives est la colonne vertébrale.
– On retrouve également une différence de répartition des lésions arthrosiques périphériques entre genres
(différenciation sexuelle des activités quotidiennes).
Cette variation d’intensité de l’arthrose d’un site anatomique à l’autre et d’un sexe à l’autre semble indiquer
l’existence d’activités propres à chaque sexe, ce que
l’anthropologue Martin appelait des «occupations féminines et masculines» (Martin 1979).
– L’âge moyen d’apparition des lésions se situe aux
alentours de 30-35 ans, ce qui correspond à l’âge physiologique. De façon prévisible, l’importance de l’arthrose
croît avec l’âge du sujet, mais il existe parfois quelques
sujets âgés épargnés par les lésions arthrosiques sévères
et porteurs uniquement de lésions modérées.
Infections
Seules les infections chroniques sont visibles en
paléopathologie, les infections aiguës, notamment
létales, n’ayant pas suffisamment de temps pour causer
des lésions osseuses.
Seuls des individus adultes jeunes de Monterenzio
Vecchia sont porteurs de lésions infectieuses (tableau 2).
Plusieurs hypothèses sont possibles pour expliquer ce
fait : insalubrité de l’habitat? Densité de population
excessive (peu crédible)? Réponse immunitaire insuffisante (car terrain débilité : diabète, goutte, origine génétique, poly-parasitisme alimentaire, etc.)? Lallo a
montré qu’un des principaux facteurs intervenant dans
les différences de fréquence des infections inter – et
intra-groupes (notamment entre hommes et femmes
d’une même population) était alimentaire (Lallo 1978);
or, rien n’indique que les apports aient été insuffisants si
l’on s’en tient aux lésions carentielles visibles sur les
squelettes.
La relativement grande fréquence d’ostéomyélite
chronique (3 cas) ne trouve, pour nous, aucune explication convaincante. Si l’apparition d’une telle infection a
pu être favorisée par l’existence d’une thalassémie hétérozygote chez l’individu MV L, aucun facteur débilitant
n’a été mis en évidence sur les deux autres sujets.
Cas particulier no 1 (MV 5)
Chez cet homme de plus de 45 ans a été mise en
évidence une vaste coulée hyperostosique vertébrale
thoracique supérieure (les portions thoracique basse et
lombaire ne sont pas conservées), avec un aspect en
«colonne de bambou». Il n’existe pas de côté prédominant. Il s’agit d’une ossification des ligaments prévertébraux et interépineux, en rectitude (pas de
cypho-scoliose), typique de la maladie de Forestier (ou
hyperostose diffuse idiopathique : DISH). Il s’agit d’une
forme sans enthésopathie périphérique (achilléenne,
épine calcanéenne, etc.). En effet, les articulations sacroiliaques étant libres, on peut éliminer le diagnostic de
spondylarthrite ankylosante (Resnick 1976). D’autre
part, l’absence d’aspect inflammatoire, le respect des
espaces intervertébraux et l’absence de tassement vertébraux sont autant d’arguments éliminant un processus
infectieux, notamment tuberculeux.
TABLEAU 2 – Récapitulatif des lésions infectieuses
Cas particulier no 2 (MV 12)
Sujet
Sexe
Âge
Lésion
MV B
H
25-35 Arthrite sterno-claviculaire G et D
MV L
H
35-45 Ostéomyélite chronique frontale D
MV 3
H
18-25 Ostéomyélite chronique radiale G
MV 12
H
35-45 Pleurésie chronique D (tuberculeuse?)
MV 15
H
25-45 Ostéomyélite chronique humérale G
MV 22
H
25-35 Abcès dentaire
Sur la totalité des 12 côtes droites a été notée la
présence d’appositions périostées sur la face interne (et
inférieure pour la première) sans ostéolyse au contact.
Ces lésions correspondent à des calcifications pleurales
secondaires à une pleurésie chronique. Les dépôts sont
irréguliers, percés de multiples orifices microscopiques,
et comme posés sur l’os cortical. Compte tenu de
l’importance des remaniements calcifiants, l’hypothèse
276
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
d’une tuberculose pleuro-pulmonaire a été retenue en
priorité. La présence de ces anomalies strictement localisées au gril costal (systématisation) et épargnant le reste
du squelette tant périphérique qu’axial permet d’éliminer le diagnostic de dépôts de calcite.
Malformations
Ont uniquement été observées une b-thalassémie
hétérozygote (MV L), deux malpositions dentaires identiques (MV 1 et MV 2) et une fusion congénitale costovertébrale (MV 2). Il convient de signaler qu’aucun cas
de spina bifida n’a été détecté.
Tumeurs
L’observation de néoplasies, tant bénignes que
malignes, est, comme ailleurs dans l’Antiquité, rare dans
la nécropole de Monterenzio Vecchia (5 cas). Il s’agissait
presque exclusivement de tumeurs bénignes, c’est-àdire au pouvoir destructeur et/ou invasif uniquement
local et ne causant pas de métastase (localisation
secondaire à distance de la tumeur principale).
2 cas d’ostéomes de la voûte crânienne ont été mis
en évidence, intéressant 2 sujets voisins, ce qui pourrait
constituer un argument en faveur de regroupements
familiaux. Il s’agit des individus MV 9 et MV 31 (2
femmes adultes matures). Les localisations sont cependant différentes (3 ostéomes frontaux chez MV 9, 1
ostéome palatin chez MV 31).
Un cas d’ostéochondrome (ou ostéochondromatose
synoviale) intéressait l’extrémité inférieure de l’ulna
gauche de l’individu MV 4. Elle se présentait sous la
forme d’une exostose bourgeonnante en «chou-fleur»
de 3 mm de diamètre, appendue à la surface articulaire
distale, avec léger plan de clivage avec l’os.
anomalie comparable a été publiée par Fornaciari à
Tarquinia (Étrurie) : il s’agit d’un enfant de 7-8 ans
enterré dans l’aire sacrée du temple de la Cività (Fornaciari 1987; Bonghi Jovino 2001) porteur d’une ostéolyse régulière discrètement inflammatoire développée
aux dépens de la table interne de la voûte crânienne au
cours du développement d’un anévrisme artérioveineux comparable à notre cas.
Cas particulier no 4 (MV 35)
Cet immature était porteur d’une lésion cérébrale
dont seule persistait la conséquence volumétrique (un
important effet de masse sur la faux du cerveau au niveau
du frontal). Il s’y associait un aspect hypervascularisé de
la table interne de la voûte crânienne en regard du sinus
veineux longitudinal supérieur (aspect cribriforme sans
apposition périostée, témoignant d’une irritation
méningée). Il ne fut pas retrouvé de cribra orbitalia ni
d’hyperostose poreuse associées. En revanche, il existait
un retentissement notable sur la croissance puisque l’on
observe une nette différence entre les âges dentaire
(4-6 ans) et statural (3 ans). Il faut néanmoins préciser
que cette différence a pu être liée à une autre cause, à
commencer par une carence alimentaire. Il nous a été
impossible de dire si la lésion causale était d’origine tumorale ou infectieuse (volumineux abcès cérébral), mais elle
a très probablement été la cause du décès de l’individu.
Traumatismes
Les lésions traumatiques sont fréquentes et touchent
près d’un sujet sur cinq (sans compter les lésions odontologiques). Les lésions du squelette périphérique
restaient prédominantes (tableau 3) :
Cas particulier no 3 (MV 25)
Un angiome ou une malformation vasculaire
(fistule artério-veineuse) frontale gauche para-saggitale,
de 1 cm de grand axe, presque transfixiante a été
découverte chez cet immature de 10-11 ans. Le développement de cette masse intra-crânienne a laissé une
trace en négatif (érosion osseuse) discrètement inflammatoire dans la table interne. Son aspect est nettement
différent d’une granulation de Paccioni, à commencer
par sa taille, qui aurait été considérablement excessive
pour l’âge. Précisons d’autre part que l’étude microscopique et élémentaire du liquide de décomposition
intracrânien a confirmé le diagnostic d’hémorragie
cérébrale, accréditant la thèse d’un décès brutal par
rupture de la lésion vasculaire (Charlier 2009). Une
TABLEAU 3 – Récapitulatif de l’ensemble
des lésions traumatiques
Sujet
Sexe
Âge
Lésion
MV 4
F
MV 12
H
35-45 Fracture-tassement vertébrale (T12)
MV 15
H
25-45 Fusion costo-vertébrale post-traumatique (T2)
MV 20
F
> 45 Fracture costale D
MV 31
F
> 45 Fracture ancienne de la tête humérale D
MV 36
H
45-65 Fracture costale D consolidée avec cal
> 45 Séquelle d’entorse grave de la cheville
G
Fracture de la base du 1er métatarsien G
277
Ces traumatismes intéressent 3 femmes adultes
matures (MV 4, MV 20, MV 31), 2 hommes adultes
jeunes (MV 12, MV 15) et 1 homme adulte mature
(MV 36). Aucun individu n’est décédé d’un de ces traumatismes, puisque chaque lésion présentait des signes
de consolidation complète. L’examen paléopathologique
a en outre mis en évidence que des soins sont prodigués
aux traumatisés, permettant une consolidation correcte
et une réduction anatomique.
Étude malacologique
De nombreux restes de mollusques ont pu être
mis en évidence lors du nettoyage des restes squelettiques. Le fait que nous ayons participé à la fouille des
tombes nous a permis de recueillir une grande quantité de ceux-ci. S’il ne nous a pas été possible d’identifier, en raison d’une excessive fragmentation, tous les
mollusques, en revanche, de nombreux individus de
type Caecilioides acicula Müll. ont été mis en évidence,
généralement dans les cavités crâniennes (sujets
MV 2, MV 5, MV 8, MV 9, MV 10, MV 13, MV 15,
MV 20, MV 22, MV 23). Il s’agit de petits mollusques
«anthropophages» attirés par les moisissures et la
putréfaction cadavérique (Baud 1982). Leur existence
a confirmé ce que l’archéologie et l’anthropologie
funéraire laissaient déjà entendre : les individus ont
été inhumés à l’état frais, c’est-à-dire qu’ils se sont
décomposés dans la terre et n’ont pas été inhumés à
l’état «sec» (ossements dépourvus de toute matière
organique). En effet, aucun mollusque de ce type n’a
été retrouvé dans les crémations (toute putréfaction
étant absente en ce cas puisque les ossements ont déjà
une structure minérale pure lors du dépôt en terre).
Étude cristallographique
Une étude cristallographique, menée par le Centre de
recherche et de restauration des Musées de France
(C2RMF, Musée du Louvre, Paris) avec l’aide de Vincent
Mazel et Pascale Richardin, a été réalisée sur deux échantillons retrouvés lors de la fouille fine de deux individus.
MV 20
Chez cette femme de plus de 45 ans a été mise en
évidence une calcification régulière mesurant
1,1 × 0,9 × 0,3 cm en regard de la face antérieure du
sacrum (dans un bloc de terre adhérant au 3e trou sacré
gauche). L’aspect morphologique était totalement aspécifique (Charlier 2008). L’analyse cristallographique a
révélé la présence en grande quantité d’hydroxyapatites
(Ca5(PO4)3(OH, Cl, F) et Ca10(PO4)5CO3(OH)F). Il n’a
pas été retrouvé de whitlocklite, un cristal pathognomonique des calcifications d’origine tuberculeuse (Baud
1990). Le diagnostic final d’un calcul urinaire semblait
donc très plausible, sans qu’il soit possible de proposer
un lien certain avec la cause du décès de l’individu.
MV 18
Chez cet enfant de 3 ans de sexe indéterminable a
été isolée dans le bassin une formation polyédrique de
6 mm de grand axe dont l’origine ne pouvait pas être
précisée à l’examen macroscopique (lithiase urinaire?
fragment de caillou?). L’analyse cristallographique a
révélé une composition très majoritairement à base de
quartz (SiO2) sur un fond d’anorthite (CaAl2Si2O8). Il
ne s’agissait donc pas d’une formation d’origine biologique mais bien d’origine tellurique (sa présence dans la
tombe s’expliquant donc par le remplissage de celle-ci).
Étude au MEB du fluide de putréfaction solidifié
Nous avons soumis plusieurs échantillons de fluide de
putréfaction solidifié (PFD) à une analyse microscopique
électronique à balayage afin de chercher à identifier des
fragments tissulaires ou, au moins, cellulaires, au sein de
cette substance. À notre connaissance, aucune étude de
ce type n’avait encore été réalisée sur de tels échantillons.
Il s’agissait d’une application directe de notre spécialisation anatomopathologique couplée à l’analyse élémentaire de surface possible en semi-vide. Quasiment tous les
squelettes de cette nécropole présentaient des dépôts
comparables. Seuls trois d’entre eux ont fait l’objet de
prélèvements dans un objectif expérimental (afin de
déterminer l’intérêt potentiel théorique de l’examen
microscopique de ces dépôts : Charlier 2009). Des fragments centimétriques de PFD ont été prélevés avec un
minimum de contamination directement dans la boîte
crânienne. Ils ont été nettoyés par un grattage fin et une
vaporisation délicate d’air sous pression. Les échantillons
intéressaient les tombes MV 15, MV 25 et MV 26. Ils ont
été examinés en l’état au microscope électronique à
balayage Philips XL30 CP, dans les locaux du C2RMF
(Musée du Louvre), avec l’aide de Vincent Mazel et
Pascale Richardin.
Il nous a ainsi été permis d’observer de nombreuses
structures biologiques encore présentes dans ces formations calcifiées au cours du temps (dure-mère, hématies,
filaments mycéliens, colonies bactériennes, paroi
vasculaire capillaire, etc.). Un diagnostic rétrospectif
d’hémorragie cérébrale consécutive à la rupture d’une
malformation vasculaire intra-crânienne a également pu
être porté grâce aux analyses élémentaires en semi-vide
278
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
et à la confrontation avec les données ostéo-archéologiques (MV25, fig. 19).
Étude microscopique du tartre dentaire
Les analyses effectuées sur 5 sujets (MV 7, MV 15,
MV 20, MV 21, MV 31) a fourni d’importantes informations sur l’alimentation (fig. 20). La composition de la
matrice est variable entre individus (silicate d’alumine
chez certains, phospho-calcique chez d’autres). Des
fibres végétales sont mises en évidence chez certains
sujets, mais leur extrême fragmentation ne permet pas
d’identification précise de l’espèce présente. Des cristaux
ont été retrouvés chez tous les individus, de nature
variable (silicate d’alumine, quartz, manganèse); ils ont
été responsables de l’importante usure occlusale et
proviendraient d’une fragmentation des meules à grains.
La nature mise en évidence d’un cristal de manganèse
pourrait être en rapport avec une contamination par les
peintures et vernis des céramiques.
Caractères discrets
Les caractères discrets sont des caractères physiques
(ostéologiques, pour ce qui nous concerne) codés
comme présents ou absents, sans conséquence physiopathologique pour le sujet vivant. Ne sont pas concernées les anomalies osseuses d’origine pathologique ou
consécutives à un stress. Si l’héritabilité des caractères
discrets est mal connue, il semble en revanche qu’ils
permettent de définir, à l’échelle d’une population bien
définie, des relations taxonomiques entre groupes
(Crubézy 1999). Ont été recherchés sur les squelettes de
Monterenzio Vecchia les caractères suivants : métopisme
frontal (7,8% de la population, soit 3 sujets), foramen
pariétaux (2 cas isolés), agénésie des dents de sagesse (8
Fig. 19 – Monterenzio. Empreinte endocrânienne d’une malformation
artério-veineuse chez le sujet MV 25 avec dépôt de fluide
de putréfaction solidifié adjacent.
Fig. 20 – Monterenzio. Tartre dentaire visible sur une molaire
du sujet MV 15.
sujets), torus palatin (1 cas), incisives en pelle (3 cas),
perforation olécrânienne (2 groupes bien distincts topographiquement : 1er groupe : MV 21 et MV 22; 2e
groupe : MV 3, MV 4, MV 8, MV 9, MV 14), os
wormiens (4 cas uniquement masculins), patella emarginata (5 cas dont 4 bien groupés), lombalisation de S1 (1
cas) et sacralisation de L5 (1 cas).
Synthèse
À Monterenzio Vecchia, les immatures représentent
près de 30% de la population de la nécropole. Il existe
une majorité d’hommes jeunes inhumés, mais une
nette prédominance de sujets adultes matures féminins
dans la population inhumée. Si la courbe démographique de Monterenzio Vecchia est en faveur d’une
population jeune de type «cimetière militaire» (avec
des femmes âgées non exposées aux faits de guerre :
Masset 1982, 1985, 1994), la rareté des lésions traumatiques observées sur les squelettes de ce site est assez
étonnante. Précisons cependant que l’absence de lésions
peri-mortem sur des ossements ne signifie aucunement
que l’individu n’est pas mort des suites de faits de
guerre : les traumatismes ont pu intéresser les tissus
mous (thorax, abdomen, masses musculaires des
membres).
L’ensemble des anomalies dentaires est corrélé aux
courbes démographiques de la nécropole : pertes
dentaires faibles chez les hommes (à la mortalité prématurée) tandis que les femmes sont l’objet de nombreuses
pertes (avec un décès à un âge avancé), important taux de
caries avec une prédominance pour la dentition postérieure (bloc prémolaires-molaires) en faveur d’une
279
alimentation riche en hydrates de carbone, cassures
dentaires fréquentes liées à la fragilisation des dents
cariées.
La stature moyenne des individus est de 170,3 cm
chez les hommes, contre 162 cm chez les femmes (un
dimorphisme sexuel classique). De nettes différences de
fréquence, de topographie et de sévérité de l’arthrose
ont été mises en évidence entre sujets masculins et féminins du site qui s’expliquent, d’une part par une mortalité différente entre sexes, mais également par des
activités physiques différentes entre hommes et femmes.
Face à la grande fréquence des infections, plusieurs
hypothèses sont possibles : insalubrité de l’habitat de
Monterenzio Vecchia? Plus forte densité de population?
Déficit immunitaire lié à un terrain débilité (consanguinité)? Dans ce contexte, un individu porteur de déformations osseuses consécutives à une b-thalassémie
hétérozygote a été observé.
Si les ostéomes de la voûte crânienne restent la
tumeur la plus fréquente, la présence de processus
expansifs intracrâniens a été retrouvée chez deux immatures, ce qui est bien surprenant pour une série ostéoarchéologique de moins de 40 sujets.
Il apparaît, à l’analyse des fréquences des différents
caractères discrets, mais aussi de leur répartition topographique, que 2 groupes humains semblent exister à
Monterenzio Vecchia (d’après la répartition des cas de
perforation olécrânienne, d’os wormiens et de patella
emarginata) :
– 1er groupe (MV 19, MV 21, MV 22, MV 26,
MV 33);
– 2e groupe (MV 3, MV 4, MV 8, MV 9, MV 14).
Il est intéressant de noter que le 1er groupe se superpose à l’un des regroupements de cas d’hypoplasie de
l’émail dentaire (MV 12, MV 20, MV 21, MV 22, MV 23,
MV 31), de même que le 2e groupe se superpose au
second regroupement de cas d’hypoplasie de l’émail
(MV L, MV 2, MV 3). Ces superpositions renforcent
l’existence de deux groupes humains distincts (familiaux?) au sein de la nécropole.
Plusieurs études spécialisées se sont révélées fructueuses. L’étude malacologique a permis de confirmer le
dépôt des défunts dans les tombes à l’état frais, c’est-àdire au tout début de la putréfaction; en effet, les
nombreux Caecilioides acicula Müll. identifiés sont des
mollusques anthropophages attirés par la décomposition
cadavérique. L’étude cristallographique a permis de
déterminer la nature exacte de deux calcifications
isolées au cours de la fouille (chez MV 20, une femme
adulte mature, un calcul urinaire a pu être diagnostiqué;
chez MV 18, en revanche, l’analyse a infirmé la nature
biologique de la calcification, au profit d’un cristal de
quartz, d’origine tellurique). L’étude au microscope
électronique à balayage (MEB) du fluide de putréfaction
solidifié, méthode nouvelle pour la première fois mise
en application sur ce site, s’est révélée riche d’enseignements : elle a permis d’observer de nombreuses structures biologiques encore présentes dans ces formations
calcifiées au cours du temps (dure-mère, hématies, filaments mycéliens, colonies bactériennes, paroi vasculaire
capillaire, etc.); un diagnostic rétrospectif d’hémorragie
cérébrale consécutive à la rupture d’une malformation
vasculaire intra-crânienne a également pu être porté
grâce aux analyses élémentaires en semi-vide et à la
confrontation avec les données ostéo-archéologiques
(MV25). Une étude comparable au microscope optique
(après courte décalcification) et au MEB (en l’état) du
tartre dentaire, a également été réalisée sur des échantillons de sujets du même site : elles ont permis de préciser
le régime alimentaire de ces individus et a fourni une
illustration de l’importante flore bucco-dentaire
présente chez cette population étrusco-celtique.
Prochainement un travail opposant, sur le plan
anthropologique et paléopathologique, les communautés
contemporaines de Monterenzio Vecchia et de Monte
Bibele (Monte Tamburino) sera mis en place, permettant
de juger de l’homogénéité ou non de ces 2 populations
voisines, installées de part et d’autre de la vallée de l’Idice.
Cet aperçu des études anthropologiques en cours
– des recherches d’ADN ont été tentées sans résultat sur
des échantillons prélevés sur plusieurs tibias. Les analyses
biomoléculaires ont été effectuées par le laboratoire de
Médecine légale du CHRU de Strasbourg, par le Professeur Bertrand Ludes et le Docteur Christine Keyser –
donne une première idée de la population inhumée dans
ce petit cimetière de la vallée de l’Idice et livre des informations précieuses quant aux modalités d’inhumation et
l’état sanitaire de cette communauté mixte où se mêlent,
c’est ce que suggère en tous cas l’analyse des mobiliers
funéraires, des individus d’origine étrusque et celtique.
Philippe CHARLIER (Service de Médecine Légale et d’Anatomie/Cytologie Pathologiques, Pavillon Vésale,
CHU Raymond Poincaré [AP-HP, UVSQ], Garches. HALMA-IPEL, UMR 8164 du CNRS, Université de Lille
3, Villeneuve d’Ascq), Claudia GENTILI (Université de Ravenne), Thierry LEJARS (CNRS, UMR 8546-ENS),
Venturino NALDI (Musée Luigi Fantini, Monterenzio) et Daniele VITALI (Université de Bologne et Ravenne)
357
colline, autour de la moitié du VIIe siècle : l’oblitération
programmatique des phases œnôtres (Phase 2) et la mise
en place d’une série de dépôts à caractère rituel (Phase 1).
En guise pour le moment de pure spéculation, nous
pourrions en effet nous demander si le statut exceptionnel des structures appartenant à l’âge du Fer indigène
de l’Incoronata n’aurait pas pu représenter la raison de ce
besoin de tout oblitérer d’une manière si radicale, de faire
tabula rasa d’un édifice dont la signification devait jouer
un rôle évidemment prédominant : une destruction
directement proportionnelle à la portée des monuments
caractérisant la facies œnôtre de la colline. À la fois, la
présence de ces anciens vestiges aurait bien pu repré-
senter le motif qui a poussé les Grecs à venir justement ici
à réaliser et à déposer rituellement leur céramique, si
souvent exceptionnellement figurée. Dans cette perspective, nous nous trouverions dans un contexte – bien
connu dans les «Dark Ages» méditerranéennes – de
ré-appropriation en sens héroico-cultuel, au VIIe siècle,
d’une tradition implantée sur, ou à côté, des espaces
(d’habitation?) appartenant à l’élite dominante de la
précédente phase de l’âge du Fer : un phénomène bien
attesté dans plusieurs exemples contemporains (Nazarakis Ainan 1999, p. 9-36, en particulier p. 17). Ainsi,
nous ne serions qu’au début du chemin de la compréhension de ce site...
Mario DENTI
(UMR CReAAH 6566, Laboratoire LAHM, Université
de Haute-Bretagne-Rennes 2)
Abréviations bibliographiques
LA
NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE
DE
MONTERENZIO VECCHIA
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Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2009
246
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
2. Dégradation du mortier avec de nombreuses
lacunes.
3. Présence d’incrustations et intrusion de la végétation.
4. Les murs qui longent le couloir sont endommagés
et des briques se sont détachées.
5. Beaucoup de tesselles se sont détachées de leur
support.
Plusieurs échantillons de mortier ont été testés pour
retrouver la composition, la consistance et la couleur du
matériau d’origine. Les murs qui entourent le couloir
ont été renforcés. On a essayé de trouver une solution
pour que les eaux de pluie puissent sortir du couloir. On
a enlevé le mortier des anciennes lacunes pour le
remplacer. Enfin les tesselles détachées ont été remises
en place. Un projet sera présenté l’an prochain par l’Institut des Monuments de Tirana pour permettre de laisser
les mosaïques visibles aux visiteurs, ce qui suppose
l’aménagement d’une protection adaptée.
A. Is.
Faik DRINI (IAA), Jean-Luc LAMBOLEY (UMR 5189), Philippe LENHARDT
(INRAP), François QUANTIN, Stéphane VERGER (EFA-EFR), Vasil BERETI, Saïmir
SHPUZA, Altin SKENDERAJ (IAA), A. ISLAMI (Institut des Monuments de Tirana)1
Le complexe archéologique de Monterenzio Vecchia,
situé sur le tracé de la Flaminia minor, une des principales voies de communication antiques reliant la région
padane à l’Etrurie interne, domine les vallées de l’Idice à
l’ouest et du Sillaro à l’est. Il fait face à l’ensemble voisin
du Monte Bibele, également connu pour son importante
nécropole celto-étrusque. Installée sur le flanc sudoccidental de la colline, la nécropole de Monterenzio
jouxte un habitat étrusque plus ancien dont on
commence à deviner l’importance. Pour une visite
détaillée du site et un aperçu de ces principales caractéristiques, on se reportera aux précédents comptes rendus.
Rappelons pour mémoire que ce cimetière mêle des
enfants, en particuliers des enfants morts en bas-âge, aux
adultes des deux sexes. Il faut aussi insister sur l’importance de la composante guerrière (40% des individus
adultes). C’est dans le domaine très particulier de la
guerre que l’élément nord-alpin est le plus remarquable.
Pour le reste, la référence est presque exclusivement
étrusque et italique, comme nous allons le voir avec
l’exemple du banquet.
Tandis que les objets personnels du défunt (parure,
vêtements et instruments de toilette, ces derniers étant le
plus souvent rangés dans un vase, posé aux pieds ou le
long de la jambe droite) et les attributs qui le désignent
comme être social (armes, miroirs, quenouilles et
fusaïoles) sont placés au plus près du corps, les objets
destinés à l’accompagner et à assurer son passage vers
l’au-delà sont rassemblés sur le côté et parfaitement individualisés. On trouve là des récipients, en céramique ou
en métal, des ustensiles en fer ou en bronze et des restes
osseux, que l’on peut mettre en relation avec le cérémonial du banquet.
1. Ont également participé à la campagne 2009, M.-H. Barrière
(Université de Lyon 2), A. Buqinça (Université de Pristina),
J. Clément (Université de Lyon 2), A. Dimo (Parc archéologique d’Apollonia), E. Follain (université de Lyon 2),
L. Jaupaj (Parc archéologique d’Apollonia), F. Perrin
(Université de Lyon 2), I. Reverdy (Université de
Grenoble II), Admir Xhelaj (Parc archéologique d’Apollonia).
MONTERENZIO (PROV. DE BOLOGNE).
LA NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE DE MONTERENZIO
VECCHIA : PRATIQUES ALIMENTAIRES
ET CONSOMMATION CÉRÉMONIELLE
Université de Bologne, École normale supérieure
(Ulm)-Umr 8546 du CNRS, École française
de Rome
La quarantaine de tombes fouillées entre 2000 et
2005, auxquelles il faut ajouter les restes plus ou moins
bien conservés d’une demi-douzaine de sépultures
supplémentaires récupérés en 1988, donne une idée
significative des rituels funéraires d’un de ces ensembles
de l’Apennin bolonais, à l’origine certainement plus
important. La partie conservée s’inscrit dans une brève
période couvrant la fin du IVe et le début IIIe siècle
avant J.-C. Les données archéologiques des territoires
cispadans, boïens et sénons, témoignent pour cette
période d’un bien-être matériel qui se traduit notamment par une influence marquée des modes méditerranéennes.
247
Le service de table ordinaire d’un adulte comprend
deux ou trois plats à pied, deux à quatre grandes coupes
d’une quinzaine de centimètres de diamètre, deux ou
trois coupes de taille moyenne, d’une dizaine de centimètres de diamètre, une ou deux coupelles ainsi qu’un
grand contenant, en général un vase ovoïde avec ou sans
anses (olla), plus rarement un cratère ou une situle. Si la
duplication des formes céramiques est la norme, le triplement est plus exceptionnel et limité aux ensembles les
plus riches. À ce répertoire, il faut ajouter une coupe à
boire bi-ansée, une kylix pour les hommes, un skyphos
pour les femmes. Les cas d’inversion sont rares (tombes
21 et 22, il n’est pas inopportun de souligner dans ce cas la
proximité des deux tombes et la faiblesse numérique de
leur vaisselier, respectivement onze et neuf vases,
comparé à la quinzaine d’exemplaires qui caractérise la
plupart des contextes; par la quantité de pièces, le service
de table de ces sépultures est plus conforme à celui
rencontré dans les tombes d’enfants qui intègrent ce
rituel) et leur association davantage encore (tombe 5).
Ces vases, toujours uniques et sexuellement discriminants, sont complétés dans un tiers des tombes par des
coupes à pied sans anse (jusqu’à trois exemplaires). Le
service à boisson comprend aussi dans quelques cas une
cruche, un canthare ou un gobelet à puiser en terre-cuite
dont la fonction paraît analogue à celle des kyathoi en
bronze, à la différence toutefois que ces derniers, lorsqu’ils sont attestés, sont documentés par quatre ou même
cinq spécimens de différents modules. Une passoire en
bronze, référence implicite à la préparation du vin,
complète parfois le service à boisson (tombes 3, 5 et 36).
La râpe à fromage, également utilisée pour aromatiser le
vin dans les contextes étrusques plus anciens, n’apparaît
ici que sous la forme de résidus. On ne saurait donc, dans
ce cas, comparer cet ustensile aux autres accessoires culinaires, qui sont toujours complets. Si la râpe métallique
n’est pas autrement attestée, nous trouvons en revanche
des mortiers qui ont pu jouer un rôle plus ou moins équivalent. Ces vases à fond granuleux, qui paraissent avoir
été l’apanage des hommes, devaient remplir une fonction
bien précise. Ces vases, limités à une unique pièce par
tombe, ne sont jamais séparés du service de table. On peut
donc penser dans ce cas à une utilisation pour la préparation de mets ou de breuvages réservés aux seuls individus
de sexe masculin. Enfin, il faut signaler la présence avec le
service de table de gobelets d’un genre particulier qui se
distinguent des autres vases déposés dans les tombes par
une pâte exclusivement grossière. Déposés par paire, ces
récipients, au fond souvent perforé, présentent des traces
de brûlé et sont fréquemment et volontairement brisés au
moment du dépôt. Leur aspect fruste est une constante
qui répond très certainement aux impératifs du rituel.
Bien qu’associés aux ustensiles de table, tout usage
alimentaire paraît exclu. Il nous semble préférable de les
interpréter comme des accessoires utilisés, dans le cadre
du rituel funéraire, en marge du banquet. Des analyses
permettront peut-être de préciser leur fonction et de
valider l’hypothèse de vases brûle-parfum, précédemment avancée.
Les broches et couteaux à viande, rares, sont attestés
dans trois contextes seulement, tous masculins (tombes
8, 15 et 36). Dans la dernière tombe, broches et
couteaux étaient associés à une paire de chenets, les
seuls documentés dans toute la nécropole (fig. 26).
Au-delà des ustensiles et contenants qui garnissent
la tombe, il nous faut imaginer la nature des contenus et
leur utilisation dans le rituel funéraire. Il s’agit de boissons (du vin comme le laissent deviner certains ustensiles comme la passoire et la kylix, mais pas uniquement)
et d’aliments solides. Des offrandes végétales (les
analyses archéobotaniques donnent, pour l’habitat de
Monte Bibele, un aperçu des denrées végétales produites
et consommées à cette époque, dans la région) nous ne
savons rien puisqu’il n’a été trouvé ni graines, ni
noyaux, ni résidus d’aucune sorte. Les offrandes carnées
ne sont repérables que dans la mesure où elles sont associées à des restes osseux. Des pièces désossées pouvaient
également participer de cette mise en scène, mais il n’en
subsiste aucune trace, seule le dépôt de broches permet
d’envisager la présence de tels morceaux.
Les ossements animaux, documentés dans plus des
deux tiers des cas, démontrent la matérialité de ces
denrées. Font exception la plupart des contextes infantiles et deux tombes d’adultes (la tombe 21 qui dispose
d’un service de table réduit, et la tombe 28). Les parties
osseuses conservées indiquent qu’il s’agit dans tous les
cas de porcs, l’animal qui entre dans plus de 50% de
l’alimentation carnée de l’habitat de Monte Bibele. Il
s’agit d’animaux immatures ou de jeunes adultes. Le
choix des morceaux, également standardisé, se limite à
des plats de côtes qui sont prélevés entre la Ve et XIVe
vertèbre, avec ou sans les vertèbres correspondantes.
Des traces de découpes sont visibles sur la plupart des
côtes recueillies. La localisation et la forme des entailles
indiquent pour la préparation des morceaux des
pratiques de boucherie parfaitement réglées (fig. 27). Le
thorax et la colonne vertébrale sont sectionnés longitudinalement. Les deux moitiés étaient ensuite divisées en
portions plus petites, avec les parties de vertèbres attenantes (les processus épineux) ou en les séparant, après
avoir taillé les têtes articulaires des côtes. La pièce de
viande était ensuite brisée et peut-être repliée comme
248
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 26 – Monterenzio Vecchia, tombe 36, candélabre et ustensiles pour la préparation et la cuisson des viandes (broche, couteau et chenet)
(T. Lejars del.).
l’indiquent les entailles visibles sur la partie médiane de
la face ventrale et les traces de fracture observées en vis
à vis sur la face externe. L’expérimentation pratiquée
sur des animaux actuels a montré, avec des traces de
découpe et des fractures comparables à celles observées
ici, qu’une telle pratique correspond à un mode opéra-
Fig. 27 – Monterenzio Vecchia, reconstitution anatomique de la cage
thoracique des restes de porc déposés dans la tombe 32
(cliché E. Maini).
toire bien déterminé. L’objectif n’était pas la découpe
nette des côtes en deux parties, mais l’affaiblissement de
l’arc costal – d’abord les entailles rapprochées, sur la face
ventrale, puis la pression exercée sur les extrémités et la
fracture de la face externe – de manière à replier les
deux parties ainsi obtenues.
L’absence de trace de décharnement, le fait que ces
côtes constituent parfois des ensembles de trois ou
quatre pièces maintenus en position anatomique, et que
la plupart sont dépourvus de leurs articulations,
démontrent qu’il s’agissait de pièces de viande à part
entière, analogues à celles consommées dans la vie
quotidienne. Ces morceaux, pour n’être pas les meilleurs, n’en était pas moins de bonne qualité. On peut
également se demander si la viande a été déposée dans
la tombe encore crue ou si elle a été cuisinée, bouillie ou
rôtie, avant le démembrement de l’animal. Des indices
de cuisson, même limités, peuvent être retenus si l’on
tient pour pertinent le noircissement des surfaces
visibles sur quelques os.
Les morceaux ainsi préparés étaient déposés en
quantité variable, de deux à six pièces par tombe, et
placés sur des vases ouverts, des coupes principalement
249
les vases, en particulier les formes basses ouvertes, pour
partie sur le sol, mêlés aux vases ou dans leur voisinage
immédiat (fig. 29 et 30). On note enfin, au sein de ces
amas, des vides qui trahissent la présence d’objets en
matériaux périssables (par exemple, tombe 12).
Fig. 28 – Monterenzio Vecchia, tombe 20. Distribution
des restes osseux animaux à l’intérieur des contenants en céramique,
détail (cliché T. Lejars).
et des plats (fig. 28). La répartition des ossements
indiquent qu’ils dépassaient souvent les limites du vase.
Dans d’autres cas, ils paraissent avoir été déposés directement sur le sol ou plus probablement sur des supports
organiques (plat, écuelle, assiette, etc.) qui ont depuis
disparu sans laisser d’autres traces que leur contenu.
Les éléments constitutifs du service de table (vaisselle, ustensiles et nourriture carnée) sont présents dans
la plupart des tombes, à l’exception d’une partie des
individus les plus jeunes et d’un adulte. Il est remarquable que les enfants des tombes 24, 25 et 33, âgés de
3/5 ans, aient reçu les mêmes honneurs que leurs aînés.
Le guerrier incinéré de la tombe 28, complètement
atypique dans ce contexte, se distingue quant à lui par
une absence de vases et d’ossements animaux, alors que
sa sépulture s’intègre parfaitement dans l’organisation
du cimetière. Cette anomalie peut s’expliquer de bien
des manières. On peut avancer, parmi diverses hypothèses, une origine exogène de ce guerrier ou encore des
conditions de décès particulières, qui ont conduit à
modifier les règles et la pratique funéraire. Partout
ailleurs, la vaisselle et les restes alimentaires sont
présents et ont été déposés ensemble à la droite du
défunt, à la hauteur de la tête ou du thorax. Les vases,
serrés les uns contre les autres, le plus souvent à plat,
parfois inclinés ou couchés, parfois renversés, suggèrent
qu’ils avaient été placés sur un support en matériau
organique, sorte de table basse. L’espace circonscrit
dessine dans plusieurs cas un tracé nettement quadrangulaire (de 60 sur 80 cm pour la tombe 12). Les récipients les plus volumineux (cratère, situle et olla) ont
souvent été brisés et écrasés consécutivement à l’effondrement de la couverture du caveau (tombes 3, 5, 14 et
36). Les ossements animaux sont posés pour partie sur
Fig. 29 – Monterenzio Vecchia, tombe 22. Distribution
des restes osseux animaux et des contenants en céramique,
détail (cliché T. Lejars).
Fig. 30 – Monterenzio Vecchia, tombe 7. Plan de répartition des vases
et offrandes alimentaire (bleu : olla, skyphos et canthare, rouge :
coupes, vert : coupelles, orange : plat à pied, marron : gobelets;
M. della Casa del.).
250
La nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Dans la tombe 7, le service de table et les offrandes
alimentaires étaient déposés sur une table rectangulaire
d’environ 50 cm sur 90, placée à la droite du défunt
(fig. 30). La disposition des vases ne doit rien au hasard.
Le service est divisé en deux groupes symétriques
disposés de part et d’autre d’un canthare à vernis noir.
Les côtelettes de porc placées sur la table respectent cette
partition de l’espace. Les grands contenants (vin ou
eau?), décalés vers le Nord, paraissent quant à eux
directement posés sur le sol. L’ensemble était complété
au Sud par un candélabre avec pied et fût en bois et
porte-chandelles en fer. Chandeliers et brûle-parfums
participaient de cette ambiance festive comme
l’indiquent les représentations figurées sur les monuments étrusques contemporains. Situé à l’écart, sur le
côté Ouest, un vase à parfum (amphorisque en céramique à vernis noir), complétait le mobilier. Ce souci de
la mise en scène du mobilier déposé est fréquent. Dans
un autre genre, on peut signaler l’olla de la tombe 1 qui,
placée au centre du dispositif, supportait un canthare
étrusque, posé à l’envers, que recouvrait un casque, à la
manière de certains vases cinéraires d’époque villanovienne.
Une telle mise en scène n’est pas sans rappeler les
représentations de banquets, peintes sur les parois de la
tombe Golini I à Orvieto, datée du milieu du IVe siècle
av. J.-C. et contemporaine des tombes les plus anciennes
de Monterenzio Vecchia. On découvre là, près de grands
chandeliers et des brûle-parfums, des tables chargées de
boissons et de victuailles présentées dans des récipients
qui ne sont pas très différents des nôtres. L’analogie,
toute proportion gardée, est saisissante.
Si la duplication du service de table caractérise de la
même manière les ensembles funéraires de Monte
Bibele (deux gobelets, deux plats, deux grandes coupes,
deux coupes de taille moyenne et parfois deux plus
petites), le triplement de certaines formes (plats à pied,
grandes coupes à vernis noir surtout, coupes moyennes,
coupes à pieds) est plus fréquent à Monterenzio Vecchia.
A Bologne, la situation est sensiblement différente,
puisque si l’on trouve effectivement dans les sépultures
de la phase celtique de la vaisselle en bronze étrusque et
certains accessoires du cérémonial du banquet, la part de
la céramique paraît plus ténue et le service de table, lorsqu’il est attesté, se limite généralement à un seul
convive. Dans les ensembles funéraires de la basse vallée
du Reno (Marzabotto et Casalecchio di Reno), pour se
limiter au domaine des Boïens, le rituel très différent
exclut aussi bien les objets que les usages et concepts
d’origine étrusco-italique. Par leur aspect et la sobriété
de leur mobilier, ces sépultures sont similaires à celles
des régions transalpines. Les groupes inhumés dans les
cimetières de Monterenzio Vecchia et Monte Bibele,
bien qu’appartenant à la zone d’influence boïenne,
présentent de ce point de vue davantage d’affinités avec
leurs homologues Sénons qui furent incontestablement,
parmi les Celtes établis dans la péninsule, les plus
ouverts aux influences méridionales.
La signification de ces offrandes alimentaires est plus
difficile à cerner. On peut supposer que les objets utilisés
au cours du rituel et laissés dans la tombe, étaient indissolublement liés au mort, et peut-être même lui appartenaient-ils au même titre que les effets personnels
(comme le couteau à découper les viandes, etc.). La
présence de services avec des vases destinés à plusieurs
participants (deux ou trois suivant les cas) permet toutefois d’écarter l’idée d’un simple viatique réservé au seul
défunt pour son voyage dans l’au-delà (suggéré par la
présence fréquente dans la main droite d’un fragment
métallique, désigné comme aes rude). La référence au
banquet avait indéniablement une valeur sociale et
marque un moment important pour la communauté des
vivants – il s’agit de groupes élitaires qui fondent leur
pouvoir sur la puissance guerrière – qui se retrouve et
rend un hommage au disparu. Cet hommage ne s’arrête
pas là puisque l’on a retrouvé en surface de plusieurs
tombes des concentrations d’ossements animaux et de
vases brisés, qui indiquent que l’on ne manquait pas de
revenir sur la tombe pour quelque célébration (repas
d’anniversaire, etc.).
Si les céramiques peintes, les vases à vernis noir ou
encore les récipients et ustensiles métalliques nous
invitent à regarder du côté de l’Étrurie tyrrhénienne,
nous savons que la pratique du banquet funèbre était
partagée par la plupart des peuples italiques. De fait, on
reconnait dans le rituel mis en œuvre à Monterenzio
Vecchia, comme à Monte Bibele, des traits singuliers qui
trouvent davantage d’analogie chez les Ombriens que
chez les Étrusques. Cela n’a rien de surprenant si l’on
considère la position géographique des groupes de
l’Idice, en limite des territoires émiliens et romagnols, et
la présence de populations ombriennes à l’Est du Sillaro
(par exemple, à Montericco, près d’Imola). On trouve
dans les ensembles funéraires ombriens, comme à
Monterenzio, les mêmes gobelets en céramique grossière, alors qu’ils paraissent absents des contextes funéraires étrusques padans. Il en va de même de la présence
du mortier en contexte masculin ou de l’usage préférentiel de vase à boire comme la kylix ou le skyphos (Montericco, Colfiorito di Foligno, etc.).
Ces remarques, suscitées par l’étude du service de
table et des accessoires qui l’accompagnent, montrent
251
l’importance et le poids des composantes étrusques et
ombriennes, à partir du IVe siècle av. J.-C., dans le
processus de construction des nouvelles communautés
qui résultent d’apports multiples, d’interactions et de
fusions. L’analyse des nécropoles boïennes, de Bologne,
de la vallée du Reno et de l’Idice, montre également que
ce processus n’est pas uniforme et que les Celtes ne
furent pas tous, loin s’en faut, aussi réceptifs aux modes
et coutumes des populations indigènes.
Melissa DELLA CASA (Université de Bologne), Thierry LEJARS
(CNRS-Umr8546, ENS, Paris), Elena MAINI (Université de
Bologne), Venturino NALDI (Musée archéologique de Monterenzio)
et Daniele VITALI (Université de Bologne)
LES SITES DE HAUTEUR DES VESTINS :
ÉTUDE DE L’ORGANISATION TERRITORIALE
D’UN PEUPLE DE L’ITALIE PRÉROMAINE
École française de Rome, Soprintendenza per i
Beni archeologici dell’Abruzzo, Université de
Picardie-Jules Verne
La 4e campagne d’étude des sites fortifiés et de
l’organisation territoriale des Vestins Cismontani et des
Péligniens Superaequani s’est déroulée du 5 au 31 juillet
2009, en collaboration avec Vincenzo d’Ercole (Soprintendenza per i Beni archeologici dell’Abruzzo). Comme
les années précédentes, nous avons profité d’une
précieuse contribution matérielle de la Comunità
Montana Amiternina, dirigée par Giacomo Di Marco.
Malgré les circonstances difficiles et la situation
d’urgence créée par le séisme du 6 avril 2009, nous
avons bénéficié d’un accueil chaleureux de la part de la
population du village de Fossa, dont nous avons partagé
le quotidien à la tendopoli. Une quinzaine d’étudiants,
provenant de diverses Universités françaises et
italiennes, a participé à cette campagne 2.
À l’issue des trois précédentes campagnes, 36 sites
fortifiés ont déjà été étudiés et nous avons dans un
premier temps complété nos observations en examinant
les quelques centres fortifiés signalés qui n’avaient pas
encore été vus. Nous avons également conduit des prospections dans plusieurs secteurs : le massif du Monte
Sirente, les versants méridional et septentrional de la
plaine de L’Aquila et le pourtour de la vallée de Capes-
2. Les étudiants qui ont participé à cette campagne 2009 provenaient des Universités Lumière Lyon 2, Lille 3-Charles-deGaulle, Picardie-Jules Verne, Provence, G. D’Annunzio
trano, avec une attention particulière pour le territoire
de Villa Santa Lucia degli Abruzzi. Nous possédons
désormais une carte archéologique à jour, documentant
l’occupation des sommets de la région de l’Âge du
Bronze final à l’époque médiévale. Enfin, nous avons
complété nos observations en réalisant une série de
sondages sur le Monte di Cerro (communes de Sant’Eusanio Forconese et Fossa), aussi bien à l’intérieur de la
surface enclose que dans le secteur de la porte orientale
et de sa rampe d’accès.
Les opérations de prospection
Nous avons poursuivi l’étude du versant septentrional du massif du Monte Sirente, le long duquel on
peut supposer l’existence d’un itinéraire antique reliant
le territoire des Èques à ceux des Péligniens et des
Marses et passant par le haut-plateau des Rocche, les
Prati del Sirente, avant de longer le flanc du Monte
Sirente et du Monte San Nicola, pour déboucher sur le
Piano di Baullo et la Forca Caruso. Pour documenter la
dernière portion de cet itinéraire, nous avons exploré le
secteur du Pianoro di Canale jusqu’à Cerreta (commune
de Gagliano Aterno). Après avoir passé le Pianoro
dell’Acqua (1337 m), dont le fond est occupé par une
petite cuvette qui sert d’abreuvoir pour les troupeaux,
en parcourant tout le chaînon calcaire qui domine la
conque de Castelvecchio Subequo, nous avons découvert un site sur le sommet du Capo della Piaia (1410 m).
Au SE, ce sommet est protégé par un fossé, dont la
largeur varie de 5,90 à 7,60 m et que l’on peut suivre
Chieti, Roma 1-La Sapienza, Marc Bloch-Strasbourg, ainsi
que de l’École normale supérieure.
MEFRA – 123/1 – 2011, p. 237-376.
Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2010
262
La Nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
direction d’Agron Islami, responsable du Département
des mosaïques à l’institut des Monuments de Tirana. Ces
travaux réalisés du 16 au 30 juin, ont permis de remettre
au jour et de les laisser visibles les mosaïques pendant
toute la saison estivale, ce qui est une première. Cette
initiative a largement contribué à la valorisation du site,
si l’on en juge au nombre des touristes venant visiter ce
secteur jusqu’alors complètement ignoré. Les mosaïques
ont dû être recouvertes à la fin de la campagne d’été, car
l’absence de couverture rend impossible de les laisser à
l’air libre pendant la saison d’hiver, et les problèmes de
gardiennage, et donc de sécurité, ne sont pas encore
résolus au niveau du Parc archéologique.
Les interventions pour la conservation ont consisté :
– Au nettoyage de la végétation dense qui avait couvert tout le monument et son alentour. Au début des
travaux toute la maison était cachée par cette végétation, par des arbustes et même des petits arbres. Il a fallu
procéder au le nettoyage général de la maison et de son
contexte environnemental.
– À la remise au jour de la mosaïque de la partie
sud-est du péristyle de manière graduelle, en enlevant
d’abord le sable et puis le plastique afin d’éviter le sèchement rapide de la surface et le changement rapide thermique, qui est phénomène très dangereux pour les
tesselles.
– Au nettoyage mécanique des racines de plantes
qui avaient pénétré sur et sous la surface de la
mosaïque. En même temps, a été fait aussi le nettoyage
des dépositions superficielles.
– Au lavage de la surface mosaïquée en utilisant un
détergent neutre dilué dans l’eau à 1-2%.
– Au remplacement du mortier là où il était
lacunaire, et aux restaurations des bordures en consolidant le muret de briques.
– Au replacement des tesselles qui ont été arrachéesde leur support en utilisant un mortier adéquat
déjà employé l’an dernier.
– À la restauration du muret de protection en brique
qui entoure la mosaïque au nord et à l’ouest.
– À l’aspersion d’un herbicide (Roundup) dans l’espace de l’impluvium et autour des structures afin de prévenir le développement de la végétation autour du
monument, et dans la cour intérieure.
– En collaboration avec le Direction de l’Atelier des
Monuments de Tirana il a été possible de remplacer la
partie endommagée de la clôture qui entoure le monument.
Le temps a manqué pour atteindre l’extrémité nord
du couloir, et les travaux se sont arrêtés au niveau de
l’emblema central.
Agron ISLAMI
Faïk DRINI (IAA), Jean-Luc LAMBOLEY (UMR 5189), Philippe LENHARDT
(INRAP), François QUANTIN, Stéphane VERGER (EFA – EFR), Saïmir SHPUZA,
Altin SKENDERAJ, Vasil BERETI (IAA), Erik FOLLAIN, Marie-Hélène BARRIÈRE
(UMR 5189) et Agron ISLAMI (Institut des Monuments de Tirana)
MONTERENZIO (PROV. DE BOLOGNE).
LA NÉCROPOLE CELTO-ÉTRUSQUE
DE MONTERENZIO VECCHIA :
LES TOMBES FÉMININES
Université de Bologne, École normale supérieure
(Ulm)-UMR 8546 du CNRS et École française de
Rome
Le complexe archéologique de Monterenzio Vecchia,
situé sur le tracé de la Flaminia minor, une des principales voies de communication antiques reliant la région
padane à l’Étrurie interne, domine les vallées de l’Idice à
l’ouest et du Sillaro à l’est. Il fait face à l’ensemble voisin
du Monte Bibele, également connu pour son habitat et
son importante nécropole celto-étrusque. Installée sur le
flanc sud-occidental de la colline, la nécropole de Monterenzio jouxte un habitat étrusque plus ancien dont on
commence à deviner l’importance. Pour une présentation détaillée du site et un aperçu de ces principales
caractéristiques, on se reportera aux précédents comptes-rendus. Nous rappelons pour mémoire que ce cimetière daté de la fin du IVe s. et début IIIe s. av. J.-C. mêle
des enfants, en particuliers des enfants morts en bas-âge,
aux adultes des deux sexes. Il faut aussi insister sur l’importance de la composante guerrière (près de la moitié
des adultes) et la prépondérance dans le domaine très
particulier de la guerre de l’élément nord-alpin. Pour le
263
reste, la référence est presque exclusivement étrusque et
italique, comme nous nous proposons de le montrer
avec le costume et les attributs féminins.
Sur la quarantaine de tombes fouillées entre 2000
et 2005, auxquelles il faut ajouter les restes plus ou
moins bien conservés d’une petite dizaine de sépultures
supplémentaires récupérés en 1988, les femmes représentent moins du tiers de l’effectif total. L’étude
anthropologique a permis de dénombrer dix femmes
sur les 28 individus identifiables, âgés de plus de
16 ans. L’analyse des mobiliers archéologiques permet
quant elle d’attribuer treize dépôts funéraires à la
sphère féminine, neuf adultes et quatre enfants, âgés
de trois à onze ans. Comme à Monte Bibele, les
femmes sont toutes inhumées, l’incinération, très
minoritaire, étant réservée à certains guerriers (tombes
16, 28 et 32).
La population féminine se compose majoritairement
de femmes adultes matures (plus de 45 ans, tombes 4, 7,
20, 21 et 31) et âgés (plus de 65 ans, tombes 9 et 14).
Une seule femme est âgée de moins de 45 ans (tombe
2). À Monterenzio Vecchia, la plupart de femmes disparaît à un âge adulte mature (après 45 ans) alors que les
hommes meurent majoritairement à un âge adulte
jeune (16-45 ans). Une telle distribution s’explique classiquement en anthropologie funéraire par des faits de
guerre qui fauchent la vie des hommes jeunes, les décès
féminins avant 45 ans étant principalement dus aux
complications des grossesses. Il existe un cas d’ambiguïté
sexuelle, c’est-à-dire de dissociation entre le sexe déterminé par les méthodes anthropologiques et le sexe
indiqué par le mobilier funéraire (sexe archéologique). Il
s’agit de la tombe 19, féminine du point de vue anthropologique mais masculine quant au mobilier archéologique. Les analyses biomoléculaires pratiquées par le
laboratoire de Médecine légale du CHRU de Strasbourg
(par le Professeur Bertrand Ludes et le Docteur Christine
Keyser) n’ont pas permis d’extraire l’ADN nécessaire à la
détermination du sexe génétique, en raison du mauvais
état de conservation des squelettes, ainsi que de l’extrême percolation des ossements.
Dans la nécropole de Monterenzio Vecchia, les
tombes féminines, ou supposées comme telles, se mêlent
aux ensembles masculins sans qu’il soit possible pour le
moment d’établir d’éventuels regroupements. Il est également difficile d’établir un lien entre elles et les tombes
d’enfants ou de nouveaux nés (fig. 35). Les datations
obtenues à partir du mobilier (céramique et métallique)
indiquent pour les ensevellissements une chronologie
analogue à celle des ensembles masculins, correspon-
dant aux dernières décennies du IVe s. av. J.-C. et au
début du IIIe s.
Les assemblages féminins se distinguent par la présence d’objets significatifs quant au sexe et au statut des
défunts. Figurent en premier lieu les accessoires du costume et les parures, mais aussi certains objets caractéristiques liés au travail de la laine, et plus rarement des
ustensiles associés aux soins corporels ou à la toilette, ou
encore certains vases. Les fibules, en quantité variable,
sont présentes dans huit ensembles, dont une tombe
d’enfant. Elles sont de type «La Tène» ou «Certosa»,
parfois en fer, le plus souvent en bronze ou en argent. Si
les fibules de type «La Tène» se rencontrent aussi dans
les assemblages masculins, les «Certosa» en sont absentes. À cela s’ajoutent des appliques de coiffes (elles
sont situées pour la plupart près du crâne) en forme
d’oméga, le plus souvent en argent, parfois en fer. Il ne
subsiste rien en revanche du ceinturon ou de ses constituants. Parmi les accessoires vestimentaires on peut
mentionner certains groupes composés de petites fibules
en bronze de type «Certosa» et de pendeloques, réunies
par des chaînettes également en bronze. Nous reviendrons plus avant sur ces ornements de poitrine.
La parure, relativement sobres, se compose pour
l’essentiel de colliers de perles, en ambre, ou en ambre
et verre. Dans certains cas, lorsque le nombre de perles
est réduit, on peut supposer l’utilisation conjointe d’éléments en matériaux organiques (bois, etc.) qui ne se
sont pas conservées. Des anneaux digitaux en bronze ou
en argent, passés à la main droite ou à la gauche et dans
certains cas aux deux, complétaient les assemblages
(tombes A, 9, 14 et 20). Les bracelets, brassards et
anneaux de chevilles, bien connus par ailleurs (à Casalecchio di Reno notamment), ne font pas parti du trousseau féminin des ensembles de Monterenzio Vecchia ou
de Monte Bibele. Les bijoux en or dont se parent les
femmes des nécropoles sénonnes (Montefortino) en
sont également absents.
Il faut ajouter à cela quelques objets plus insolites
comme le scarabée en ambre de la tombe 7 (Fábry
2009). Il est orné d’une figure féminine ailée incisée à la
base (fig. 36). Le caractère exceptionnel de la pièce est
dû à l’emploi inhabituel de l’ambre pour la réalisation de
gemmes. L’objet a été trouvé à proximité immédiat de la
main droite avec des petites perles de verres placées de
chaque côté. Il a pu être utilisé comme anneau digital,
mais il n’en subsiste aucune armature métallique, ou
comme ornement de bracelet ou peut-être même
comme aes rude (ces derniers prennent habituellement
la forme d’un fragment de métal).
Le nécessaire de toilette se limite le plus souvent au
264
La Nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 35 – Monterenzio Vecchia. Répartition des tombes féminines.
265
Fig. 36 – Monterenzio Vecchia. Scarabée en ambre de la tombe 7.
miroir et à de petits récipients probablement destinés
aux parfums et aux onguents. Les miroirs en bronze
sont présents dans trois des neuf tombes d’adultes
(tombes 2, 7 et 20). Ces objets caractéristiques de la fin
du IVe s.-début du IIIe s. av. J.-C. sont généralement
ornés (un simple liseré d’ocelle sur le miroir de la tombe
2, un couple de personnages féminins ailés sur l’exemplaire de la tombe 7, et un unique personnage féminin
ailé sur celui de la tombe 20) et équipés d’un manche
tronconique en os (Penzo 2006; Fábry 2010). L’exemplaire de la tombe 20 présente des traces de réparation.
Il avait été placé au sud des vases, entre la jambe droite
et les quenouilles. Le miroir de la tombe 7 avait été
déposé sous les genoux avec une coupelle. Celui de la
tombe 2 couvrait un petit vase en céramique déposé à
part, près de la tête. Un lécythe et une embouchure en
bronze de vase à onguent complétait l’attirail. L’étude
des embouchures métalliques de récipients en peau (a
gabbia) de la nécropole de Monte Bibele a permis d’établir une distinction par la taille : les diamètres les plus
grands sont présents dans les ensembles masculins
tandis que les plus petits seraient caractéristiques des
contextes liés à la sphère féminine.
Le statut féminin de l’inhumée est aussi signifié par
des objets emblématiques liés au tissage ou plus généralement au travail de la laine suivant en cela un usage
profondément ancré dans la tradition étrusco-italique.
Cette référence à l’art du filage est une constante des
assemblages féminins. Il s’agit de fusaïoles en terre-cuite
et d’éléments osseux interprétés comme des garnitures
de quenouilles (cabochons et tubes cylindriques à
embouchure droite ou dentelée). Un vase leur est parfois associé. Ces ustensiles avec éléments osseux, également présents à Monte Bibele, sont documentés depuis
l’époque étrusque, dans les nécropoles de Bologne (Certosa, tombe 300) et Spina (Vitali 2008). Le nombre de
ces objets varie indépendamment de l’âge des défuntes.
La paire de fusaïoles déposée aux pieds de l’enfant de la
tombe 33, âgé de 4/5 ans, la signale comme une enfant
et la situe d’ores et déjà dans le domaine féminin. Dans
les tombes 4, 14, 21 et 33, seules les fusaïoles sont documentées. L’association fusaïole-quenouille n’est attestée
que cinq fois (tombes A, 2, 7, 9 et 20). L’absence de garnitures osseuses ne peut être toutefois tenue pour significative dans le mesure où l’on ne peut exclure
l’utilisation de quenouilles entièrement organique. L’absence de fusaïole dans la tombe 31 étonne davantage
étant donné la fréquence habituelle de ces objets. L’association fusaïoles-quenouilles-vase représente donc la
forme la plus complète d’un service qui signale la
femme, telle Pénélope, comme productrice de tissu ou
maître d’œuvre des productions de la maisonnée.
Les tombes féminines disposent d’un service de
table sensiblement équivalent à celui des hommes, à
l’exclusion des ustensiles en bronze. Le nombre de
vases varie de neuf à vingt pièces pour les tombes
d’adultes contre deux à onze pour les ensembles attribuées à des enfants de sexe féminin. Si la typologie des
formes est également semblable, on remarque la présence de vases uniques et sexuellement discriminants.
C’est le cas en particulier des skyphoi (pâte dépurée ou à
vernis noir avec décor surpeint), par opposition à la
kylix qui demeure un des principaux marqueurs masculins avec le mortier. C’est aussi la présence de skyphoi
dans les tombes d’enfants 24 et 25 qui permet de les
Fig. 37 – Monte Bibele. Histogramme des tombes féminines
avec skyphos.
266
La Nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 38 – Monterenzio Vecchia. Tableau synoptique des parures et attributs féminins.
Fig. 39 – Tableau synoptique des mobiliers féminins des ensembles de Monterenzio Vecchia et Monte Bibele (adultes et enfants de sexe féminin).
267
Fig. 40 – Monterenzio Vecchia. Marqueur féminins de la tombe 20 : toilette (miroir) et filage de la laine (fusaïoles et garnitures de quenouilles).
268
La Nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchia
Chronique
Fig. 41 – Monterenzio Vecchia. Parures de la tombe 20 : chaînettes-fibules-pendeloques, fibules, bague et perles de verre.
assigner à l’univers féminin. Pour les femmes adultes,
on note une seule exception avec le dépôt d’un kylix à
la place du skyphos (tombe 21). De façon générale, les
cas d’inversion sont rares. Outre l’ensemble mentionné,
il faut signaler la tombe de guerrier 22 où, cette fois, la
kylix est remplacée par un skyphos. Il n’est pas inopportun de souligner dans ce cas la proximité des deux
tombes et la faiblesse numérique de leur vaisselier, onze
et neuf vases; du point de vue quantitatif, le service de
table de ces sépultures est plus conforme à celui des
tombes d’enfants. À Monte Bibele, le skyphos est associé
aux femmes dans seulement 15 cas sur 28 (Vitali 2008).
Cette différence avec Monterenzio Vecchia s’explique
en partie par l’histoire longue de la nécropole de Monte
Bibele et une plus grande rareté des skyphoi dans les
phases plus anciennes (Ve s. et première moitié du IVe s.
av. J.-C.). Dans les tombes postérieures, le skyphos est
présent dans 11 contextes sur 15 (fig. 37); sur les quatre
exclus trois sont privés de mobilier céramique. Rappelons que la phase ancienne de Monte Bibele n’est pas
documentée à Monterenzio Vecchia.
Ce rapide aperçu de la documentation funéraire
féminine, qu’il s’agisse de la parure et des accessoires
vestimentaires, ou encore des objets liés au statut des
individus (fig. 38) montre une grande ressemblance
avec la situation rencontrée à Monte Bibele (Challet
2008; Vitali 2008) (fig. 39). Pour illustrer la similitude
des mobiliers et des usages funéraires de ces deux comunautés voisines, nous pouvons évoquer, pour conclure,
le cas de la tombe 20 de Monterenzio Vecchia. La femme
mature inhumée dans cette tombe se signale par un
mobilier relativement complet comprenant un service
d’une quinzaine de vases dont un skyphos, un miroir, un
assortiment de trois quenouilles en os avec fusaïoles en
terre-cuite (fig. 40), des perles en verre placées sur la
poitrine (collier?) et une bague en argent à la main
269
gauche. Elle portait en outre sur chaque épaule une
chaînette en bronze ornée de pendeloques en goutte et
de petites fibules de type Certosa, ainsi qu’une fibule en
fer de type La Tène (fig. 41). Ce type de parure trouve
des parallèles exactes dans quatre tombes de Monte
Bibele (tombes 27, 49, 77 et 95) datées de La Tène B2
(fin IVe-début IIIe s. av. J.-C.) et relativement distantes
les unes des autres. La tombe 27, qui a livré ce type de
chaînettes avec des fibules en fer de type Certosa et La
Tène, assurément la plus ancienne, permet de situer
l’apparition de cette mode dans la vallée de l’Idice vers le
milieu du IVe s. av. J.-C. Toutefois, c’est la tombe 77 qui
offre la meilleure comparaison avec le groupe chaînettes-fibules-pendeloques de la tombe 20, bienqu’il ne
s’agit plus cette fois d’une femme d’âge mûr mais d’une
enfant de 6/8 ans.
À travers ces marqueurs du statut du défunt nous
voyons non seulement qu’il est possible de distinguer les
ensembles masculins et féminins mais aussi qu’il existe
une forte corrélation entre les pratiques funéraires des
deux nécropoles de la vallée de l’Idice. À l’homogénéité
des parures et des attributs s’ajoute la volonté d’inscrire
dans le domaine des femmes certains enfants décédés
prématurément. Comme pour le service de table et les
accessoires du banquet, les marqueurs féminins relèvent
presque entièrement de la tradition étrusco-italique. La
référence au monde celtique se limite à la présence de
quelques rares fibules laténiennes.
Philippe CHARLIER (CHU Raymond Poincaré, Garches/Laboratoire d’éthique médicale et de médecine
légale, Université de Paris 5), Nicola BIANCA FÀBRY (Université de Bologne), Thierry LEJARS
(CNRS-UMR 8546, ENS-Paris), Venturino NALDI (Musée archéologique de Monterenzio) et Daniele
VITALI (Université de Dijon)
LES SITES DE HAUTEUR DES VESTINS :
ÉTUDE DE L’ORGANISATION TERRITORIALE
D’UN PEUPLE DE L’ITALIE PRÉROMAINE
École française de Rome, Soprintendenza per i
beni archeologici dell’Abruzzo, Université de
Picardie-Jules Verne, CNRS et Université de
Bourgogne
De 2006 à 2009, quatre campagnes de prospections,
d’étude et de sondages ont été conduites sur le territoire
des Vestins Cismontani et des Péligniens Superaequani,
dans le but de mieux dater les enceintes perchées qui y
sont signalées, mais également de mieux comprendre
dans la longue durée l’organisation territoriale de cette
région montagneuse. Ces opérations nous ont permis de
découvrir et de documenter 9 habitats d’époque protohistorique (dont 3 probablement fortifiés), 2 nécropoles
tumulaires protohistoriques, 3 sites enclos d’époque
romaine, 5 gisements ouverts d’époque romaine et 6
sites d’époque médiévale, soit un total de 25 nouveaux
gisements archéologiques. Un premier bilan de ce programme a été présenté lors de journées d’études, qui se
sont déroulées à l’École française de Rome les 12 et
13 février 2010 et qui ont consenti également de dresser
un panorama complet des recherches dans la région, de
la Protohistoire à l’époque médiévale. Les actes sont en
cours de publication.
À l’issue de ces campagnes de terrain, la 5e campagne a donc eu lieu du 15 au 30 juillet 2010 et a été
consacrée d’une part au relevé topographique de trois
sites fortifiés inédits, découverts en 2007 et 2008, et
d’autre part à l’étude du matériel récolté lors des campagnes 2008 et 2009 et déposé à l’antenne archéologique du château de Capestrano. Nous avons enfin
complété nos observations précédentes en réalisant
deux sondages le long du circuit méridional de l’enceinte du Monte di Cerro.
L’étude du Monte di Cerro
Le Monte di Cerro est un dôme de calcaire, qui
culmine à 754 m d’altitude, à cheval sur les communes
de Sant’Eusanio Forconese et Fossa. À son sommet se
trouve une enceinte de forme ovale, longue de 1020 m.
Nous avons, en 2006 et 2007 notamment, effectué des
prospections dans la surface enclose (4,65 ha) et dans
les alentours immédiats du site et en 2009 ont été réalisés plusieurs sondages, sur le circuit méridional (z),
dans le secteur de la porte orientale (b, g, d, P), ainsi
qu’à l’intérieur de l’habitat (a, e, h, u). Afin de mieux
documenter la construction de l’enceinte elle-même,
nous avons cette année prolongé le sondage z jusqu’au
parement interne et ouvert un autre sondage (i), en
correspondance du précédent, le long du parement
externe.
373
La campagne de fouille et de recherche à L’Incoronata a enregistré cette année l’activité de deux équipes
qui participent à la publication finale de la fouille
(actuellement en cours de préparation). Nous rappelons
que les résultats des analyses archéomagnétiques
conduites par l’équipe du Groupe d’ArchéomagnétismeRennes (UMR 5060, dirigée par Philippe Lanos) sur les
nombreuses briques retrouvées remployées dans les
couches les plus récentes de l’occupation de la colline,
ont été publiés dans Denti-Lanos 2007 et Hill et alii
2008. Dans ces ouvrages l’on trouvera également les
résultats des analyses C14 menées par le Centre de datation par le radiocarbone de Lyon sur les charbons de bois
contenus dans les couches de remplissage de la carrière.
Des analyses chimiques sur le contenu d’un échantillon de formes céramiques destinées à contenir des
liquides, présentes dans le dépôt US 2 du Secteur 4, ont
été menées par l’équipe ANR PERHAMO («Parfums et
Résidus Huileux de la Méditerranée Occidentale»,
dirigée par Dominique Frère, Université de Bretagne
Sud), dans l’objectif d’approfondir la compréhension de
la nature des matériaux conservés et la destination des
vases. Une analyse approfondie des restes osseux a été
entamée, et est actuellement en cours, par l’équipe d’Archéozoologie du Museum of London Archeology,
dirigée par James Morris, dans le but d’intégrer les résultats des analyses précédemment présentées dans les
publications de l’Université de Milan, à la lumière des
nouvelles perspectives heuristiques issues de l’étude
approfondie des contextes de découverte menée par
notre équipe.
L’attention que nous avons en effet essayé de
réserver de façon majeure à l’analyse minutieuse des
contextes de fouille, et plus particulièrement aux modalités de la déposition des objets au sein des grands dépôts
réalisés dans ce secteur de la colline au troisième quart
du VIIe siècle, a progressivement canalisé nos intérêts et
permis d’approfondir nos réflexions sur la méthodologie
de l’approche actuelle à l’étude et à la fouille de ces
contextes archéologiques. Dans cette perspective, nous
avons organisé à l’Université de Rennes 2 (UMR 6566)
une Table ronde, intitulée La céramique dans les contextes
rituels. Fouiller et comprendre les gestes des Anciens (juin
2010, sous la direction de M. Denti et de M. TuffreauLibre, avec les conclusions de J.-P. Morel), dans l’objectif
d’ouvrir une discussion et de nous confronter avec des
spécialistes de différentes phases chronologiques autour
de cette problématique. Les actes sont actuellement en
cours de préparation.
Mario DENTI
Abréviations bibliographiques
APOLLONIA D’ILLYRIE (ALBANIE)
Atlas d’Apollonia = Apollonia d’Illyrie. 1. Atlas archéologique
et historique, textes réunis par V. Dimo, Ph. Lenhardt
et F. Quantin, Rome, 2007 (Collection de l’École française de Rome, 391).
Fraisse-Moretti 2007 = Ph. Fraisse et J.-Ch. Moretti,
Exploration archéologique de Délos XLII. Le théâtre,
Paris, 2007.
MONTERENZIO VECCHIA
Challet 2008 = V. Challet, Les bijoux de la nécropole de
Monte Bibele (Monterenzio, BO), dans D. Vitali et
S. Verger (dir.), Tra mondo celtico e mondo italico. La
necropoli di Monte Bibele, Bologne, 2008, p. 61-76.
Fábry 2009 = N. B. Fábry, Lo scarabeo della tomba 7 di
Monterenzio Vecchio e le parures d’ambra delle necropoli
etrusco-celtiche della valle dell’Idice, dans Ocnus, 17,
2009, p. 23 – 27.
Fábry 2010 = N. B. Fábry, Uno specchio con «Lasa» alata
dalla necropoli di Monterenzio Vecchio nell’Appenino
bolognese, dans Acta Archaeologica Academiae Scientiarum Hung., 2010, p. 97-104.
Penzo 2006 = A. Penzo, Specchi di bronzo, dans D. Vitali
(dir.), I bronzi degli Etruschi e dei Celti nella Valle dell’Idice [catalogo della mostra], dans Quaderni del Museo
Archeologico «Luigi Fantini», 3, 2006, p. 14-16.
Vitali 2008 = D. Vitali, La nécropole de Monte Bibele : préliminaires pour une analyse spatiale et chronologique,
dans D. Vitali et S. Verger (dir.), Tra mondo celtico e
mondo italico. La necropoli di Monte Bibele, Bologne,
2008, p. 9-52.